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En bon généraliste, Roland Lemye, qui vient de céder la présidence du syndicat à Jacques de Toeuf, a gardé la main sur l'épineux dossier du TPO.Il comprend l'attrait des patients pour le système, plus confortable puisqu'il n'exige pas d'avancer la quote-part remboursée par l'assurance maladie lorsque le patient se rend à la consultation du médecin. Il souligne toutefois que les examens complémentaires, les médicaments, ou simplement les aléas de la vie ne sont pas couverts par le système. Roland Lemye l'affirme : " L'obligation du TP risque d'avoir des conséquences négatives pour le patient et la facilité apparente qu'il procure risque de lui coûter cher. "Il cite en exemple l'assurance automobile où le TP est pratique courante. Toutefois, les compagnies décident souvent que les réparations sont inutiles et déclassent les véhicules. Plus grave : en Scandinavie et au Royaume-Uni, ce déclassement s'applique de plus en plus aux patients âgés qui se voient refuser des interventions au-delà d'un certain âge (dialyse au-delà de 65 ans, pas d'intervention cardiaque après 70 ans, etc.) " sans oublier les files d'attente ".L'Absym craint que le TPO, limité pour le moment à 2 millions de patients mais qui pourrait n'être qu'un début, n'obère fortement l'autonomie du médecin, désormais au service de l'Etat, des mutuelles et des assureurs, au lieu d'être l'avocat du patient.Déjà certains proposent d'étendre le TPO aux malades chroniques. " Ce sont ceux qui en ont le moins besoin. C'est à notre initiative qu'ils ont bénéficié d'une franchise au-delà de laquelle tous leurs soins sont remboursés (devenus maintenant maximum à facturer). De plus, en ce qui concerne la consultation du généraliste, ils la paient souvent avec le remboursement de la précédente, à laquelle ils ne doivent ajouter que le ticket modérateur. "Le syndicat de médecins rappelle qu'il a toujours privilégié la qualité des soins en revalorisant la consultation du MG et en promouvant l'accréditation qui implique formation continue et échanges entre médecins." Le TP déresponsabilise à la fois le patient et le médecin, en augmentant aussi bien l'offre que la demande et détricote donc les acquis. La situation allemande, où les médecins pratiquent un TP intégral sans ticket modérateur, démontre bien les effets pervers - les patients sont vus six fois plus souvent que la moyenne européenne mais j'ajouterais que chaque fois qu'ils sont vus, ils le sont beaucoup moins longtemps. "Le Dr Lemye dit comprendre les aspirations des patients à la gratuité " mais ils doivent réfléchir aux conséquences. Qu'ils ne soient pas naïfs vis-à-vis des intentions des mutuelles qui se sont dressées pour leur barrer la route en se prétendant le syndicat des patients ".Il appelle les patients à n'être pas dupes " d'un système qui n'a comme but que de donner encore plus de pouvoir aux mutuelles ".Quelques jours plus tôt, Jean-Pascal Labille (Solidaris) répétait que le TPO est une avancée sociale. "Ce combat relève de la justice sociale dans la mesure où elle contribue à faire en sorte qu'une personne qui ne dispose pas de beaucoup de moyens n'ait plus à se poser la question de savoir si elle a assez d'argent pour se soigner elle-même ou ses proches." Le secrétaire général de Solidaris veut d'ailleurs "rendre le tiers payant social obligatoire pour les malades chroniques, comme c'était prévu initialement".