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On suppose que le tabagisme est peut-être associé à un pronostic défavorable du COVID-19, de nombreuses preuves ayant mis en évidence son impact négatif sur la santé pulmonaire et son association causale avec une pléthore de maladies respiratoires. Le tabagisme nuit également au système immunitaire et à sa réactivité aux infections, ce qui rend les fumeurs plus vulnérables aux maladies infectieuses. Des études antérieures ont montré que les fumeurs sont deux fois plus susceptibles que les non-fumeurs de contracter la grippe et de développer des symptômes plus sévères, et certains travaux ont suggéré que les fumeurs étaient également plus susceptibles de connaître une mortalité plus élevée lors de l'épidémie de MERS-CoV.Il reste cependant, étant donné la nouveauté clinique du SARS-CoV-2 et de l'épidémie, à préciser les liens entre le tabagisme et COVID-19. Pour y parvenir, le 17 mars 2020, deux chercheurs grecs ont entrepris une revue systématique des études publiées en 2019 et 2020 sur la maladie à l'aide de deux bases de données (PubMed, ScienceDirect). (1)Cinq études ont été retenues. Concernant des patients atteints de COVID-19, elles ont toutes été menées en Chine, dont quatre à Wuhan et une dans les provinces de Chine continentale, et elles couvrent les deux premiers mois de la pandémie (décembre 2019 et janvier 2020).La première étude (2) porte sur un total de 191 personnes infectées. Elle montre que sur 54 décès enregistrés, 9% sont des fumeurs actuels vs 4% de fumeurs parmi les 137 patients guéris.Dans la deuxième étude (3), l'analyse des caractéristiques cliniques de 140 patients infectés révèle que parmi les 58 patients ayant développé une forme sévère de la maladie, 3,4% sont des fumeurs actuels et 6,9% d'anciens fumeurs, tandis que parmi les 82 patients ayant développé une forme plus légère de la maladie, aucun n'est fumeur et seuls 3,7% sont d'anciens fumeurs, ce qui suggère que les fumeurs encourent un risque multiplié par 2,23 de maladie plus sévère.Dans la troisième étude (4), parmi 41 patients infectés, aucun des 13 qui ont été admis en unité de soins intensifs n'est un fumeur actuel. En revanche, parmi ceux qui n'ont pas été dans une telle unité, trois sont des fumeurs actuels, sans différence statistiquement significative entre les deux groupes de patients.La quatrième étude (5), la plus large, réalisée avec 1 099 patients infectés de plusieurs régions de Chine continentale, constate que chez 173 patients présentant des symptômes sévères, 16,9% sont des fumeurs actuels et 5,2% d'anciens fumeurs, tandis que chez 926 patients présentant des symptômes légers, 11,8% sont des fumeurs actuels et 1,3% d'anciens fumeurs. De plus, dans le groupe de patients qui ont besoin d'une ventilation mécanique, d'une admission aux soins intensifs ou qui sont décédés, 25,5% sont des fumeurs actuels et 7,6% d'anciens fumeurs. En revanche, dans le groupe de patients qui n'ont pas eu ces résultats défavorables, seulement 11,8% sont des fumeurs actuels et 1,6% d'anciens fumeurs.A partir des données publiées, les deux scientifiques grecs ont pu calculer que les fumeurs sont 1,4 fois plus susceptibles d'avoir des symptômes graves de COVID-19 et environ 2,4 fois plus susceptibles d'être admis dans une unité de soins intensifs, d'avoir besoin d'une ventilation mécanique ou de mourir par rapport aux non-fumeurs.Enfin, la cinquième étude (6) a permis de constater qu'au sein d'un échantillon de 78 patients infectés, le groupe de ceux pour lesquels la maladie a eu des effets indésirables compte une proportion plus élevée de sujets ayant des antécédents de tabagisme que le groupe de ceux qui ont connu une amélioration ou une stabilisation : 27,3% vs 3,0%, une différence statistiquement significative. L'analyse de régression logistique multivariée montre que les antécédents de tabagisme sont un facteur de risque de progression de la maladie.Même si les données actuellement disponibles restent limitées, et bien que les résultats ci-dessus ne soient pas ajustés pour d'autres facteurs qui peuvent influer sur la progression du COVID-19, les auteurs de cette revue de la littérature estiment d'ores et déjà que le tabagisme est très probablement associé à la progression négative et aux résultats indésirables de cette maladie.Et la conclusion est limpide : c'est le moment ou jamais d'arrêter de fumer sachant aussi que le tabagisme est le facteur le plus fortement associé aux troubles respiratoires et que le coronavirus peut également endommager le système respiratoire.(références : (1) TobaccoInduced Diseases (TID), 18 mars 2020, doi : 10.18332/tid/119324, (2) The Lancet, 11 mars 2020, doi :10.1016/S0140-6736(20)30566-3,(3) Allergy, 19 février 2020, doi :10.1111/all.14238,(4) The Lancet, 24 janvier 2020, doi :10.1016/S0140-6736(20)30183-5,(5) New England Journal of Medicine, 2020, doi :10.1056/NEJMoa2002032,(6) Chinese Medical Journal, 28 février 2020, doi :10.1097/CM9.0000000000000775)