Le but est de rapprocher le secteur non marchand du marchand mais le rapport n'a pas tellement exploré les conséquences fiscales des zones grises. Sous réserves des éclaircissements qui apparaitraient dans le texte final de la loi, et sans vouloir dès à présent occuper les vacances de noël des médecins en sociétés et de ceux qui gèrent des associations professionnelles ou siègent dans des conseils médicaux, relevons quelques orientations et leur impact sur les ASBL, désormais largement soumises au régime commun. Ce sera une introduction à l 'usine à gaz des réseaux d'hôpitaux.

Un cadeau empoisonné

Le nouveau code supprime la différence basée sur le but de lucre ou la nature de l'activité, commerciale ou non. La notion de société civile à forme commerciale utilisée pour l'exercice de la médecine disparait de ce fait. La société est liée à la notion d'entreprise et l'ASBL ne se distingue plus des autres sociétés que par la possibilité ou non de partager les bénéfices entre les associés. Toute ASBL pourra avoir une activité commerciale sans réserve pour réaliser son but, pour autant qu'il n'y ait pas de distribution directe ou indirecte de bénéfices, à part ceux découlant de la défense des intérêts des membres dans l'objet. Ainsi, la structure d'Union Professionnelle disparait mais une ASBL peut en reprendre l'activité économique, telle l'achat pour revente aux membres de matériel nécessaire à l'exercice de la profession, et se faire reconnaitre en tant qu'Union Professionnelle. Cette transformation d'office sera même prévue dans la loi pour les UP existantes, tandis que les ASBL Classiques devront se limiter provisoirement à leur activité telle que découlant de la loi de 1921 actuelle tant qu'elles n'auront pas modifié leurs statuts. Le critère déterminant du partage de bénéfices couvre des avantages indirects comme des rémunérations déguisées ou des payements de prestations dépassant le prix normal.

La différence entre rémunération de services rendus et partage de dividendes ne sera pas toujours évidente. Le danger lié à la possibilité de dissolution judiciaire d'ASBL ou d'annuler des opérations répondant à un simple but de lucre subsiste, mais l'ASBL hospitalière est exposée à un autre danger. Comme le soulignait le député CDH Michel de Lamotte dans la discussion du rapport, le fisc sera tenté de requalifier les activités hospitalières pour leur appliquer l'impôt des sociétés. Il en rêve depuis des années. Cet impôt-ci pourrait alors grever les hôpitaux ou chambres syndicales ayant des bénéfices non réinvestis dans l'objet et le statut des réserves financières se posera. Le principe de non-discrimination et la menace d'actions en concurrence déloyale pourraient justifier cette extension de l'impôt sur les sociétés. Le ministre Geens, qui porte la réforme, a évacué cette question dans le débat sur le rapport, parce que l'aspect fiscal n'appartient pas au domaine de compétence de son département.

Ajoutons en ce qui concerne les hôpitaux, que les subsides d'investissements pourraient également être affectés. Il en va de même du calcul du budget de fonctionnement de l'hôpital. Le Ministère de la Santé a déjà en son temps diminué les prix dans certains hôpitaux en fonction des recettes de parking ou des suppléments de chambre. L'élargissement de l'objet pourrait alors se révéler un cadeau empoisonné.

Assouplissements de fonctionnement

Le texte retenu comporte des assouplissements dans le fonctionnement des sociétés sur lesquels les médecins seront éclairés par leurs experts fiscaux. Les ASBL pourront bénéficier aussi de facilités. De manière générale, le conseil d'administration doit en principe compter au moins 3 administrateurs mais l'obligation de compter plus de membres dans l'assemblée générale que d'administrateurs, disparait. Elle compliquait la vie d'ASBL composées de peu de membres et particulièrement 3 ou 5 membres eux même ASBL, comme des hôpitaux ou organisations syndicales. Ce sont les vrais membres et leurs décisions qui comptent en Assemblée ; on doit actuellement pour satisfaire à la loi, leur adjoindre des membres nominaux, personnes physiques faisant nombre en AG mais disposant en réalité d'un droit de vote inférieur. Cette contrainte disparaitra, ce qui facilitera la constitution des organes dirigeants des réseaux d'hôpitaux. Ils pourront plus facilement associer des mandataires publics de toutes couleurs, des représentants des stakeholders et des médecins, pour former un collège largement supérieur en nombre à celui des quelques hôpitaux constituant l'Assemblée générale disposant du pouvoir de contrôle.

D'autres assouplissements de fonctionnement sont étendus aux ASBL, comme la cooptation d'administrateurs ou le vote par écrit.

Il est intéressant de s'arrêter un instant à la généralisation du régime de responsabilité des administrateurs qui est prévue. La loi insiste sur le principe selon lequel ceux-ci sont tenus à la bonne exécution de leur mandat. L'administrateur fantôme, perpétuellement absent physiquement ou mentalement, plaie des conseils d'ASBL, qui ne lit pas les PV ni les comptes, sera impliqué dans les décisions et coresponsable collégialement des éventuelles fautes dans la gestion ou dans la surveillance. On vise dans le deuxième cas des commissaires de complaisance sans exclure les réviseurs soucieux de ne pas contrarier leur client. Cette responsabilité sera cependant soumise à plafonnement des dommages intérêts, sauf en cas de manoeuvres doleuses ou de décisions prises dans le dessein de nuire. Quand on pense à des licenciements fautifs couteux pour l'hôpital mais décidés pour se débarrasser coute que coute d'un président de conseil médical insoumis, on peut approuver l'idée d'une responsabilité personnelle du dirigeant parallèle à celle de la Société. Il faut bien admettre aussi que, dans certaines ASBL y compris de médecins, on pouvait constater une indifférence incroyable des administrateurs aux règles de droit, votant des décisions sans s'être informés, refusant même de prendre connaissance de tout fait contrariant leur décision. Remarquons que l'administrateur qui aura interpelé le conseil sur une suspicion de faute ou l'aura dénoncée, en sera exonéré.

La loi pourrait entrer en vigueur en mai 2019 pour s'appliquer en 2020, mais avec un grand nombre d'adaptations complexes, y compris des transformations automatiques de statuts.

On peut espérer que la généralisation d'un droit commun aux sociétés et aux ASBL entrainera une gestion plus rigoureuse de certaines de ces dernières et pas seulement dans les sociétés de joueurs de pétanque mais aussi là où les professionnels de santé se défoncent pour l'intérêt général, et les patients.

Le but est de rapprocher le secteur non marchand du marchand mais le rapport n'a pas tellement exploré les conséquences fiscales des zones grises. Sous réserves des éclaircissements qui apparaitraient dans le texte final de la loi, et sans vouloir dès à présent occuper les vacances de noël des médecins en sociétés et de ceux qui gèrent des associations professionnelles ou siègent dans des conseils médicaux, relevons quelques orientations et leur impact sur les ASBL, désormais largement soumises au régime commun. Ce sera une introduction à l 'usine à gaz des réseaux d'hôpitaux.Le nouveau code supprime la différence basée sur le but de lucre ou la nature de l'activité, commerciale ou non. La notion de société civile à forme commerciale utilisée pour l'exercice de la médecine disparait de ce fait. La société est liée à la notion d'entreprise et l'ASBL ne se distingue plus des autres sociétés que par la possibilité ou non de partager les bénéfices entre les associés. Toute ASBL pourra avoir une activité commerciale sans réserve pour réaliser son but, pour autant qu'il n'y ait pas de distribution directe ou indirecte de bénéfices, à part ceux découlant de la défense des intérêts des membres dans l'objet. Ainsi, la structure d'Union Professionnelle disparait mais une ASBL peut en reprendre l'activité économique, telle l'achat pour revente aux membres de matériel nécessaire à l'exercice de la profession, et se faire reconnaitre en tant qu'Union Professionnelle. Cette transformation d'office sera même prévue dans la loi pour les UP existantes, tandis que les ASBL Classiques devront se limiter provisoirement à leur activité telle que découlant de la loi de 1921 actuelle tant qu'elles n'auront pas modifié leurs statuts. Le critère déterminant du partage de bénéfices couvre des avantages indirects comme des rémunérations déguisées ou des payements de prestations dépassant le prix normal. La différence entre rémunération de services rendus et partage de dividendes ne sera pas toujours évidente. Le danger lié à la possibilité de dissolution judiciaire d'ASBL ou d'annuler des opérations répondant à un simple but de lucre subsiste, mais l'ASBL hospitalière est exposée à un autre danger. Comme le soulignait le député CDH Michel de Lamotte dans la discussion du rapport, le fisc sera tenté de requalifier les activités hospitalières pour leur appliquer l'impôt des sociétés. Il en rêve depuis des années. Cet impôt-ci pourrait alors grever les hôpitaux ou chambres syndicales ayant des bénéfices non réinvestis dans l'objet et le statut des réserves financières se posera. Le principe de non-discrimination et la menace d'actions en concurrence déloyale pourraient justifier cette extension de l'impôt sur les sociétés. Le ministre Geens, qui porte la réforme, a évacué cette question dans le débat sur le rapport, parce que l'aspect fiscal n'appartient pas au domaine de compétence de son département. Ajoutons en ce qui concerne les hôpitaux, que les subsides d'investissements pourraient également être affectés. Il en va de même du calcul du budget de fonctionnement de l'hôpital. Le Ministère de la Santé a déjà en son temps diminué les prix dans certains hôpitaux en fonction des recettes de parking ou des suppléments de chambre. L'élargissement de l'objet pourrait alors se révéler un cadeau empoisonné.Le texte retenu comporte des assouplissements dans le fonctionnement des sociétés sur lesquels les médecins seront éclairés par leurs experts fiscaux. Les ASBL pourront bénéficier aussi de facilités. De manière générale, le conseil d'administration doit en principe compter au moins 3 administrateurs mais l'obligation de compter plus de membres dans l'assemblée générale que d'administrateurs, disparait. Elle compliquait la vie d'ASBL composées de peu de membres et particulièrement 3 ou 5 membres eux même ASBL, comme des hôpitaux ou organisations syndicales. Ce sont les vrais membres et leurs décisions qui comptent en Assemblée ; on doit actuellement pour satisfaire à la loi, leur adjoindre des membres nominaux, personnes physiques faisant nombre en AG mais disposant en réalité d'un droit de vote inférieur. Cette contrainte disparaitra, ce qui facilitera la constitution des organes dirigeants des réseaux d'hôpitaux. Ils pourront plus facilement associer des mandataires publics de toutes couleurs, des représentants des stakeholders et des médecins, pour former un collège largement supérieur en nombre à celui des quelques hôpitaux constituant l'Assemblée générale disposant du pouvoir de contrôle.Il est intéressant de s'arrêter un instant à la généralisation du régime de responsabilité des administrateurs qui est prévue. La loi insiste sur le principe selon lequel ceux-ci sont tenus à la bonne exécution de leur mandat. L'administrateur fantôme, perpétuellement absent physiquement ou mentalement, plaie des conseils d'ASBL, qui ne lit pas les PV ni les comptes, sera impliqué dans les décisions et coresponsable collégialement des éventuelles fautes dans la gestion ou dans la surveillance. On vise dans le deuxième cas des commissaires de complaisance sans exclure les réviseurs soucieux de ne pas contrarier leur client. Cette responsabilité sera cependant soumise à plafonnement des dommages intérêts, sauf en cas de manoeuvres doleuses ou de décisions prises dans le dessein de nuire. Quand on pense à des licenciements fautifs couteux pour l'hôpital mais décidés pour se débarrasser coute que coute d'un président de conseil médical insoumis, on peut approuver l'idée d'une responsabilité personnelle du dirigeant parallèle à celle de la Société. Il faut bien admettre aussi que, dans certaines ASBL y compris de médecins, on pouvait constater une indifférence incroyable des administrateurs aux règles de droit, votant des décisions sans s'être informés, refusant même de prendre connaissance de tout fait contrariant leur décision. Remarquons que l'administrateur qui aura interpelé le conseil sur une suspicion de faute ou l'aura dénoncée, en sera exonéré.La loi pourrait entrer en vigueur en mai 2019 pour s'appliquer en 2020, mais avec un grand nombre d'adaptations complexes, y compris des transformations automatiques de statuts.On peut espérer que la généralisation d'un droit commun aux sociétés et aux ASBL entrainera une gestion plus rigoureuse de certaines de ces dernières et pas seulement dans les sociétés de joueurs de pétanque mais aussi là où les professionnels de santé se défoncent pour l'intérêt général, et les patients.