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Lorsqu'on demande à un directeur général si son hôpital figure dans les bons ou mauvais élèves de l'étude Maha, on entend généralement - après un petit moment de réflexion, voire de crispation - qu'il figure plutôt dans la bonne partie du classement. Or, en 2017, 39 hôpitaux généraux sur 91 étaient dans le rouge, soit 40% de l'échantillon de l'échantillon. En outre, il est de notoriété publique que le nord du pays compte nettement moins d'hôpitaux généraux en mauvaise santé financière que le sud.Les auteurs de l'étude Maha ne veulent cependant pas trop noircir le tableau. "Au niveau agrégé, le secteur des hôpitaux généraux continue à présenter une structure bilantaire saine que ce soit en terme de solvabilité, d'endettement ou de liquidité. Les ratios bilantaires dégagés au niveau du secteur présentent toutefois de fortes disparités selon les institutions; un nombre croissant d'entre elles ayant un taux de solvabilité inférieur à 20%."Les experts Maha s'inquiètent de l'incapacité de 24 institutions à dégager un " cash flow " suffisant en 2017 pour couvrir la partie de leur dette arrivant à échéance au cours de l'exercice. Elles n'étaient que 16 dans cette situation en 2016. "À l'avenir, les nouveaux modes de financement des infrastructures hospitalières, désormais régionalisés, pourraient accentuer les disparités entre les institutions disposant d'une capacité d'autofinancement et celles devant recourir à l'emprunt à long terme ", préviennent-ils. En 2017, les hôpitaux généraux ont continué à investir à hauteur de 1,5 milliard d'euros. Un montant comparable à celui de 2016. "Ce flux d'investissement est toutefois concentré sur quelques hôpitaux qui ont mené des projets de grandes envergures. Cet effort d'investissement a permis d'améliorer le niveau d'ancienneté global des infrastructures hospitalières. (...) Les investissements en équipement médical et non médical (dont 44% sont liés à l'IT) sont par contre assez stationnaires", expliquent les experts de Belfius.Ensemble les hôpitaux généraux ont réalisé en 2017 un chiffre d'affaires de 14,5 milliards d'euros, en légère progression par rapport à l'exercice précédent (+2,7%)."En réalité, la progression du chiffre d'affaires a été principalement soutenue par l'évolution des produits pharmaceutiques (+11,1%) et des forfaits (+4,7%), précisent les experts. Le budget de moyens financiers (BMF) et les honoraires, soit les deux principales composantes du chiffre d'affaires, enregistrent un nouveau ralentissement avec une croissance limitée des honoraires (+2,1%) et même une évolution légèrement négative pour le BMF (-0,1%)."Arnaud Dessoy, responsable des Etudes Public Finance et Social Profit chez Belfius banque, souligne que depuis plusieurs années le BMF, alloué par la Santé publique pour couvrir les frais d'admission et de séjour des patients dans l'hôpital, progresse à un rythme inférieur à celui du chiffre d'affaires, de sorte que son poids relatif décroît régulièrement (36.3% en 2017 et 38,2% en 2013)."Cette évolution à la baisse s'explique à la fois par la mise en oeuvre de nouvelles mesures d'économies en 2017 (près de 75 millions d'euros) mais aussi par l'impact de la régionalisation du financement des infrastructures (sous-parties A1 et A3). L'implémentation progressive des nouveaux mécanismes de financement adoptés par les Régions (selon des rythmes variables) se traduit déjà en 2017 par une progression plus soutenue des "autres produits d'exploitation" (+11,3%) qui intègrent partiellement la nouvelle intervention régionale."L'étude montre que les honoraires médicaux (40.9% du chiffre d'affaires) subissent, en l'absence de mesures d'indexation, une progression très modérée (+2,1%), légèrement supérieure à l'exercice précédent (+1,7%) mais sensiblement inférieure aux années antérieures (+3,9% en 2015 et +4,1% en 2014). Notons, par ailleurs, au niveau des coûts d'exploitation, que la rétribution des médecins (via la rétrocession d'honoraires) a progressé de 2,6% en 2017.La comptabilité analytique fait ressortir la marge négative réalisée dans les services hospitaliers. " Par tranche de chiffre d'affaires de 100 euros, ceux-ci enregistrent une perte de 1,46 euros en 2017. La marge positive réalisée par les hôpitaux généraux grâce à la pharmacie (1,21 euros) et aux services médico-techniques (2,02 euros) joue néanmoins un rôle important pour compenser le sous-financement existant au niveau du budget des moyens financiers (BMF). Le résultat final est également influencé négativement par la marge négative des services de consultation (0,78 euros pour 100 euros de chiffre d'affaires). "Pour Geert Gielens, Chief economist chez Belfius Banque, l'étude Maha 2018 fait craindre "un scénario à la Titanic" pour certains hôpitaux, ceux qui présentent un résultat courant négatif et n'ont pas de possibilité de financer leurs activités. Il voit dans les futurs réseaux hospitaliers une des solutions pour leur permettre de sortir la tête hors de l'eau. Vincent Claes