Dr Gaetan Willemart : La vielle école des années 80 défend les implants avec sérum physiologique et entretient une vieille polémique autour des gels de silicone qu'on croyait à l'origine de maladies auto-immunes. Jusqu'au début des années 2000, les prothèses en gel de silicone avaient été retirées du marché notamment en France et aux États-Unis. Jusqu'à preuve du contraire, on avait renoncé aux implants au silicone. Progressivement, pourtant, on a réintroduit les implants en silicone en matière de chirurgie reconstructrice avant de les accepter à nouveau en matière esthétique. Mais les chirurgiens plus âgés sont restés sur cette impression que les gels en silicone étaient responsables de tous les maux.

Les chirurgiens plus âgés sont restés sur cette impression que les gels en silicone sont responsables de tous les maux.

La méfiance envers ces prothèses est-t-elle liée aux risques de lymphomes anaplasiques à grande cellule (LAGC) ?

Oui, mais le risque existe aussi avec des prothèses remplies de sérum physiologique que quelques rares chirurgiens belges utilisent encore en Belgique, en les présentant comme sans danger. Ces vétérans ne sont pas représentatifs de l'ensemble de la profession des chirurgiens plasticiens et de leurs sociétés scientifiques.

Cependant, le consentement ne serait pas suffisamment éclairé...

Bien entendu, avant une intervention, les chirurgiens préviennent les patientes des avantages et des inconvénients des prothèses que ce soit pour une intervention reconstructrice ou esthétique. On est tenu par la loi d'informer les patientes avant de les opérer. On doit parler des risques mais bien sûr on ne prend pas une encyclopédie médicale pour passer en revue absolument tous les risques ! Dans le cas présent, les LAGC sont cités bien évidemment dans le consentement. Dans le document écrit, nous insistons sur cette question. Le consentement éclairé des patientes est obligatoire depuis 2013 (Loi publiée en mai 2013 dans le Moniteur) pour justement s'assurer qu'il n'y ait pas de ci de là des cowboys manquant à leur éthique. Vous trouverez toujours des cas litigieux mais l'interview dans le jdM donne l'impression que les plasticiens s'en fichent et cachent les effets secondaires aux patientes !

Le " Implant file " réalisé avec le Consortium des journalistes a laissé entendre qu'il y avait une omerta et qu'on cachait des choses...

Ce consortium mélange un peu tout. Les sites web des différentes sociétés scientifiques sont clairs : on ne cache absolument rien. Plusieurs communiqués de presse ont été publiés par la RBSPS depuis 2015 à ce sujet. Le problème est que ces cancers sont tellement rares que l'on n'a pas cru utile de nous citer dans les médias grand public. C'est devant la crainte de médiatisation, d'ailleurs, que nous avons été proactifs...

Quelles garanties offrent les fabricants ?

Le chirurgien est tenu de donner les références (type, marque) de l'implant avant chirurgie avec une réflexion préalable de 15 jours. Mais le chirurgien n'est pas le garant de la qualité des produits. La plupart des fabricants offrent des garanties variables autour de dix ans. Dans le cas où ils offrent " une garantie à vie ", cela ne veut pas dire : " l'implant ne devra jamais être remplacé ". Ces firmes-là s'engagent, en réalité, tout au long de la vie de la patiente, à remplacer gratuitement les implants usés par de nouveaux implants. Ce n'est pas la même chose !

Quelle est l'ampleur des défauts de fabrication ?

La fréquence de l'usure prématurée d'un implant est très faible. Concernant le risque de LAGC, ce n'est pas un défaut de fabrication mais certaines enveloppes "Allergan" ont été d'avantage incriminées : ce sont des implants texturés, plus rugueux, fabriqués à partir de cristaux de sel. Elles offrent de nombreux avantages mais constituent une des sources possibles de l'apparition des LAGC. Il faut toutefois relativiser car ce fabricant était parmi ceux qui, depuis des décennies, imprimait son logo et ses références sur la face cachée des implants alors que d'autres marques ne le faisaient pas.

Des membranes en polyuréthane sont également dans le viseur?

Il ne faut pas faire d'amalgame avec des polémiques datant de 1979 relatives à ces enveloppes de polyuréthane. En ce temps-là, on n'entendait pas parler des LAGC mais une étude clinique faite en 1979 en laboratoire sur des rats à propos de la dégradation du polyuréthane a été alarmiste mais jamais vérifiée. La FDA, dans les années 90, a soumis la question de l'utilisation de ces prothèses-là et conclu à un risque d'hépato-toxicité extrêmement faible. Mais les firmes n'ont pas voulu prendre le risque de le faire réadmettre sur le marché américain. Par contre, ici aussi on retrouve une incidence plus importante de LAGC, comme pour les implants macrotexturés.

Quelle est l'origine de ces cancers ?

Oui. En fait, les LAGC proviennent vraisemblablement de micro-infections bactériennes qui induisent un biofilm autour de ces implants. Ces biofilms seraient le déclencheur d'une stimulation immunitaire qui provoque ces cancers. Mais ces LAGC sont extrêmement rares, de l'ordre de 600 cas répertoriés dans le monde entier et même probablement moins car il y a des doubles comptages !

Donc, les patientes sont entre de bonnes mains en Belgique ?

Le LAGC est une pathologie qui est prise très au sérieux par la communauté des plasticiens. Ce risque est extrêmement faible par rapport au bénéfice d'apporter le bien-être à des patientes en perte de féminité ou après une mastectomie. Le pronostic de survie après un LAGC est excellent s'il est détecté tôt. L'implant est retiré, on guérit la patiente. En cas de gonflement ou de nodule anormal d'un sein survenant 6-7 ans après la chirurgie généralement, la patiente doit immédiatement consulter son chirurgien. De toute façon, un contrôle annuel clinique - et éventuellement échographique - est recommandé chez les patientes porteuses d'implants. Déjà après un an, en cas d'épanchement, le liquide doit être analysé en cytologie à la lumière des marqueurs CD30+ et ALK pour exclure le LAGC.

Dr Gaetan Willemart : La vielle école des années 80 défend les implants avec sérum physiologique et entretient une vieille polémique autour des gels de silicone qu'on croyait à l'origine de maladies auto-immunes. Jusqu'au début des années 2000, les prothèses en gel de silicone avaient été retirées du marché notamment en France et aux États-Unis. Jusqu'à preuve du contraire, on avait renoncé aux implants au silicone. Progressivement, pourtant, on a réintroduit les implants en silicone en matière de chirurgie reconstructrice avant de les accepter à nouveau en matière esthétique. Mais les chirurgiens plus âgés sont restés sur cette impression que les gels en silicone étaient responsables de tous les maux.La méfiance envers ces prothèses est-t-elle liée aux risques de lymphomes anaplasiques à grande cellule (LAGC) ?Oui, mais le risque existe aussi avec des prothèses remplies de sérum physiologique que quelques rares chirurgiens belges utilisent encore en Belgique, en les présentant comme sans danger. Ces vétérans ne sont pas représentatifs de l'ensemble de la profession des chirurgiens plasticiens et de leurs sociétés scientifiques.Cependant, le consentement ne serait pas suffisamment éclairé...Bien entendu, avant une intervention, les chirurgiens préviennent les patientes des avantages et des inconvénients des prothèses que ce soit pour une intervention reconstructrice ou esthétique. On est tenu par la loi d'informer les patientes avant de les opérer. On doit parler des risques mais bien sûr on ne prend pas une encyclopédie médicale pour passer en revue absolument tous les risques ! Dans le cas présent, les LAGC sont cités bien évidemment dans le consentement. Dans le document écrit, nous insistons sur cette question. Le consentement éclairé des patientes est obligatoire depuis 2013 (Loi publiée en mai 2013 dans le Moniteur) pour justement s'assurer qu'il n'y ait pas de ci de là des cowboys manquant à leur éthique. Vous trouverez toujours des cas litigieux mais l'interview dans le jdM donne l'impression que les plasticiens s'en fichent et cachent les effets secondaires aux patientes !Le " Implant file " réalisé avec le Consortium des journalistes a laissé entendre qu'il y avait une omerta et qu'on cachait des choses...Ce consortium mélange un peu tout. Les sites web des différentes sociétés scientifiques sont clairs : on ne cache absolument rien. Plusieurs communiqués de presse ont été publiés par la RBSPS depuis 2015 à ce sujet. Le problème est que ces cancers sont tellement rares que l'on n'a pas cru utile de nous citer dans les médias grand public. C'est devant la crainte de médiatisation, d'ailleurs, que nous avons été proactifs...Quelles garanties offrent les fabricants ?Le chirurgien est tenu de donner les références (type, marque) de l'implant avant chirurgie avec une réflexion préalable de 15 jours. Mais le chirurgien n'est pas le garant de la qualité des produits. La plupart des fabricants offrent des garanties variables autour de dix ans. Dans le cas où ils offrent " une garantie à vie ", cela ne veut pas dire : " l'implant ne devra jamais être remplacé ". Ces firmes-là s'engagent, en réalité, tout au long de la vie de la patiente, à remplacer gratuitement les implants usés par de nouveaux implants. Ce n'est pas la même chose !Quelle est l'ampleur des défauts de fabrication ?La fréquence de l'usure prématurée d'un implant est très faible. Concernant le risque de LAGC, ce n'est pas un défaut de fabrication mais certaines enveloppes "Allergan" ont été d'avantage incriminées : ce sont des implants texturés, plus rugueux, fabriqués à partir de cristaux de sel. Elles offrent de nombreux avantages mais constituent une des sources possibles de l'apparition des LAGC. Il faut toutefois relativiser car ce fabricant était parmi ceux qui, depuis des décennies, imprimait son logo et ses références sur la face cachée des implants alors que d'autres marques ne le faisaient pas.Des membranes en polyuréthane sont également dans le viseur?Il ne faut pas faire d'amalgame avec des polémiques datant de 1979 relatives à ces enveloppes de polyuréthane. En ce temps-là, on n'entendait pas parler des LAGC mais une étude clinique faite en 1979 en laboratoire sur des rats à propos de la dégradation du polyuréthane a été alarmiste mais jamais vérifiée. La FDA, dans les années 90, a soumis la question de l'utilisation de ces prothèses-là et conclu à un risque d'hépato-toxicité extrêmement faible. Mais les firmes n'ont pas voulu prendre le risque de le faire réadmettre sur le marché américain. Par contre, ici aussi on retrouve une incidence plus importante de LAGC, comme pour les implants macrotexturés.Quelle est l'origine de ces cancers ?Oui. En fait, les LAGC proviennent vraisemblablement de micro-infections bactériennes qui induisent un biofilm autour de ces implants. Ces biofilms seraient le déclencheur d'une stimulation immunitaire qui provoque ces cancers. Mais ces LAGC sont extrêmement rares, de l'ordre de 600 cas répertoriés dans le monde entier et même probablement moins car il y a des doubles comptages !Donc, les patientes sont entre de bonnes mains en Belgique ?Le LAGC est une pathologie qui est prise très au sérieux par la communauté des plasticiens. Ce risque est extrêmement faible par rapport au bénéfice d'apporter le bien-être à des patientes en perte de féminité ou après une mastectomie. Le pronostic de survie après un LAGC est excellent s'il est détecté tôt. L'implant est retiré, on guérit la patiente. En cas de gonflement ou de nodule anormal d'un sein survenant 6-7 ans après la chirurgie généralement, la patiente doit immédiatement consulter son chirurgien. De toute façon, un contrôle annuel clinique - et éventuellement échographique - est recommandé chez les patientes porteuses d'implants. Déjà après un an, en cas d'épanchement, le liquide doit être analysé en cytologie à la lumière des marqueurs CD30+ et ALK pour exclure le LAGC.