RESUME DES EPISODES PRECEDENTS : 210.239 morts le 26 avril 2020, 270.426 le 7 mai. Les mâchoires de la société-crocodile se referment sur l'espèce humaine. Solides bâtons à dresser d'urgence. Médecins, soignants et autres praticiens s'y efforcent auprès des malades. Mais les moyens de la médecine parcourent de longues chaînes d'approvisionnement. Il incombait aux politiques de les garantir, tâche entravée par une inflation de structures et de règles produites par eux-mêmes. Quant aux citoyens, espérons que leurs applaudissements augurent plus d'écoute et d'argent pour les soignants, restés au front malgré les protections insuffisantes. La politique officielle émerge d'une politique informelle née des diverses attitudes dans l'art de subir ou d'exercer un pouvoir. Les partis politiques se nourrissent de cette culture. Au peuple donc de fournir et tenir les bâtons permettant de garder la société-crocodile heureuse et ouverte.

Politique : choc des egos face aux décisions délicates. Informelle entre les citoyens, officielle dans les institutions, des communes, villes, régions, états jusqu' aux organismes internationaux.

Politique : à chacun ses raisons dans des orages d'émotions. Naviguer plus tranquilles, voilà le défi !

Politique et relations malades - médecins: choix thérapeutique

Une dame âgée refuse une chirurgie de pontage coronaire :

-Docteur, je sais pourquoi j'ai été malade : trop d'efforts pour un déménagement. Je vais mieux. Je voudrais attendre avant de me faire opérer.

Bon sens d'une non diplômée. Son état clinique et les résultats des examens confortent son intuition. Le médecin doit se montrer ouvert aux doutes du malade et ce dernier oser les exprimer. Les discussions autour des décisions médicales sèment des graines de politique.

Incapacité de travail

Reprise rapide ou longue convalescence ? Ecrit sous tensions entre le jugement du médecin, les voeux du patient et la loi, le certificat fleure l'acte politique.

Subjectivités

Les préjugés du genre " pas de traitement chimique " ou l'anti-vaccination, heurtent la science médicale de front. Il faut négocier. En cas de blocage, l'autonomie du patient peut se heurter au devoir du médecin de sauver une vie : un dilemme typiquement politique.

Argent

La Belgique offre le choix entre prestataires conventionnés ou non conventionnés. Négociation possible avec ces derniers, subtile ou tendue. Sauf pour le tiers payant, imposé par la loi aux généralistes sur base de données imparfaites, sans possibilités de corriger des injustices criantes.

La confiance : un art politique

Ces exemples illustrent comment les incertitudes laissées par la science et la loi distillent des vapeurs de politique entre profanes et spécialistes. De fait, les premiers n'ont que leur capacité à poser les bonnes questions et les seconds, leur disposition à répondre. Des deux côtés, les egos entrent en jeu pour construire la confiance. Une culture de dialogue entre spécialistes et profanes devient cruciale.

Politique et organisation des soins

Les soins de santé n'échappent pas à ce qui fait la force et, malheureusement de plus en plus, la faiblesse, du " système " belge. La force vient des commissions, comités et autres taskforces chargés de confronter les experts et les groupes d'intérêts. Cela semble très démocratique. La faiblesse repose sur la tendance des décideurs à se retrancher derrière les scientifiques ou les partenaires sociaux. La fragmentation des rôles dilue les responsabilités. Cela se passe non seulement au niveau gouvernemental, mais aussi dans la gestion des soins en ambulatoire et à l'hôpital. Plus insidieux, l'empilement de structures accapare des budgets prioritairement destinés aux besoins des malades.

Manque de clarté dans le management de l'hôpital

Entre les rôles du médecin-chef, du conseil médical, de la hiérarchie du nursing et de la direction générale, une chatte ne retrouverait pas ses petits. Les zones de confort constituées par la complexification artificielle des prises de décisions rendent toute critique inaudible. Point positif, certains managers hospitaliers pragmatiques privilégient les tâches essentielles et font preuve d'écoute, chapeau ! Mais d'autres, profitant du flou des flux financiers, entretiennent un clientélisme dispendieux en multipliant des fonctions peu utiles aux soins et sources de dysfonctionnements.

Paperasserie ou leadership ?

Une récente circulaire sur le déconfinement l'illustre : six institutions en en-têtes, quatre signatures, une d'un haut fonctionnaire et trois de médecins. Tous certainement très compétents. 7 pages pour dire ce qu'un manager hospitalier aguerri écrirait en 15 lignes, comprises au quart de tour par les chefs de service concernés.

La politique officielle reflète les relations de pouvoir dans toute la société

Politique officielle et politique informelle naissent toutes deux des manières de gérer les incertitudes et les conflits. Selon les mentalités, elles se renforcent en cercles vicieux ou vertueux. Menaces virales et autres obligeant, il faudra bien tendre vers plus de vertu. Une des premières leçons de la crise : revaloriser les métiers de terrain, comme ceux des soignants, depuis longtemps mis à mal par l'économie dite des services, notion vague et déconnectée du réel. Cessons de nous plaindre, changer la politique dépend de nous.

Prochain épisode : la politique, incomprise et mal aimée.

Politique : choc des egos face aux décisions délicates. Informelle entre les citoyens, officielle dans les institutions, des communes, villes, régions, états jusqu' aux organismes internationaux. Politique : à chacun ses raisons dans des orages d'émotions. Naviguer plus tranquilles, voilà le défi ! Politique et relations malades - médecins: choix thérapeutique Une dame âgée refuse une chirurgie de pontage coronaire : -Docteur, je sais pourquoi j'ai été malade : trop d'efforts pour un déménagement. Je vais mieux. Je voudrais attendre avant de me faire opérer.Bon sens d'une non diplômée. Son état clinique et les résultats des examens confortent son intuition. Le médecin doit se montrer ouvert aux doutes du malade et ce dernier oser les exprimer. Les discussions autour des décisions médicales sèment des graines de politique. Incapacité de travail Reprise rapide ou longue convalescence ? Ecrit sous tensions entre le jugement du médecin, les voeux du patient et la loi, le certificat fleure l'acte politique. Subjectivités Les préjugés du genre " pas de traitement chimique " ou l'anti-vaccination, heurtent la science médicale de front. Il faut négocier. En cas de blocage, l'autonomie du patient peut se heurter au devoir du médecin de sauver une vie : un dilemme typiquement politique. Argent La Belgique offre le choix entre prestataires conventionnés ou non conventionnés. Négociation possible avec ces derniers, subtile ou tendue. Sauf pour le tiers payant, imposé par la loi aux généralistes sur base de données imparfaites, sans possibilités de corriger des injustices criantes. La confiance : un art politique Ces exemples illustrent comment les incertitudes laissées par la science et la loi distillent des vapeurs de politique entre profanes et spécialistes. De fait, les premiers n'ont que leur capacité à poser les bonnes questions et les seconds, leur disposition à répondre. Des deux côtés, les egos entrent en jeu pour construire la confiance. Une culture de dialogue entre spécialistes et profanes devient cruciale. Politique et organisation des soins Les soins de santé n'échappent pas à ce qui fait la force et, malheureusement de plus en plus, la faiblesse, du " système " belge. La force vient des commissions, comités et autres taskforces chargés de confronter les experts et les groupes d'intérêts. Cela semble très démocratique. La faiblesse repose sur la tendance des décideurs à se retrancher derrière les scientifiques ou les partenaires sociaux. La fragmentation des rôles dilue les responsabilités. Cela se passe non seulement au niveau gouvernemental, mais aussi dans la gestion des soins en ambulatoire et à l'hôpital. Plus insidieux, l'empilement de structures accapare des budgets prioritairement destinés aux besoins des malades. Manque de clarté dans le management de l'hôpital Entre les rôles du médecin-chef, du conseil médical, de la hiérarchie du nursing et de la direction générale, une chatte ne retrouverait pas ses petits. Les zones de confort constituées par la complexification artificielle des prises de décisions rendent toute critique inaudible. Point positif, certains managers hospitaliers pragmatiques privilégient les tâches essentielles et font preuve d'écoute, chapeau ! Mais d'autres, profitant du flou des flux financiers, entretiennent un clientélisme dispendieux en multipliant des fonctions peu utiles aux soins et sources de dysfonctionnements. Paperasserie ou leadership ? Une récente circulaire sur le déconfinement l'illustre : six institutions en en-têtes, quatre signatures, une d'un haut fonctionnaire et trois de médecins. Tous certainement très compétents. 7 pages pour dire ce qu'un manager hospitalier aguerri écrirait en 15 lignes, comprises au quart de tour par les chefs de service concernés. La politique officielle reflète les relations de pouvoir dans toute la sociétéPolitique officielle et politique informelle naissent toutes deux des manières de gérer les incertitudes et les conflits. Selon les mentalités, elles se renforcent en cercles vicieux ou vertueux. Menaces virales et autres obligeant, il faudra bien tendre vers plus de vertu. Une des premières leçons de la crise : revaloriser les métiers de terrain, comme ceux des soignants, depuis longtemps mis à mal par l'économie dite des services, notion vague et déconnectée du réel. Cessons de nous plaindre, changer la politique dépend de nous.