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Les nouveaux amendements qui doivent être débattus mercredi en commission Justice de la Chambre, évoquent notamment la délivrance d'un "acte de naissance obligatoire" dès 140 jours de grossesse, ainsi que la possibilité de délivrer un acte de naissance "avant 140 jours".Le Dr. Véronique Masson souligne pour sa part que ces 140 jours de grossesse (20 semaines), soit 22 semaines d'aménorrhée (langage plus fréquemment utilisé par les gynécologues, qui désigne le nombre de semaines depuis le début des dernières règles), équivaut au cap physiologique de viabilité du foetus établi par l'OMS."C'est également à partir de cette période que les parents peuvent sentir l'enfant bouger. Les mouvements foetaux impliquent l'investissement des parents. Ces amendements en vue d'une reconnaissance à partir de 140 jours de grossesse cadrent mieux avec la réalité actuelle", estime-t-elle.Si la gynécologue est favorable à la possibilité d'une reconnaissance à partir de 140 jours, elle regrette néanmoins le caractère obligatoire. "Il faut cadrer avec la volonté des parents; ils ont tous leur histoire. Le fait de donner une existence à leur enfant mort-né peut constituer un acte qui permet de passer plus facilement outre le deuil mais il faut fixer une limite. A contrario, certains parents pourraient estimer les démarches administratives trop lourdes à porter après la perte de l'enfant car une reconnaissance implique des droits mais aussi des devoirs", précise le Dr. Véronique Masson.En revanche, le Pr. Catherine Donner estime que "si l'objectif est réellement de mieux accompagner les parents dans le deuil, il faut plutôt s'attaquer à la formation des équipes d'accompagnement en cas de perte du foetus avant de commencer à vouloir changer la loi en discutant sur le nombre de jours. Les équipes doivent être mieux formées et étoffées en assistantes sociales, psychologues, sages-femmes et gynécologues, ... Ils ont un rôle clef. Je ne pense pas qu'une histoire de statut va réellement aider les parents", considère-telle.La cheffe de clinique déplore que ces amendements "ne prennent pas en compte l'avis des acteurs de terrain et le vécu des parents, et sont dès lors en dehors de la réalité. Les termes utilisés ne sont pas en phase avec le sujet tellement douloureux et difficile."Toutefois, s'il fallait abaisser le nombre de jours pour pouvoir reconnaître un foetus mort-né, la spécialiste opterait pour 154 jours (soit 22 semaines de grossesse ou 24 semaines d'aménorrhée). Dans les cas les plus extrêmes, c'est à partir de cette période qu'en Belgique, au cas par cas, on peut être amenés à prendre en charge un enfant né vivant. "Par rapport aux progrès actuels de la médecine, la reconnaissance du statut à partir de 24 semaines d'aménorrhée serait légitime mais je suis moins certaine en ce qui concerne l'obligation. On priverait ainsi les parents d'une liberté de choix et dans certains cas obtenir un effet inverse à celui recherché et accentuer leur détresse. Par ailleurs, il s'agit ici de foetus nés morts et le parallèle avec un enfant né vivant n'est pas forcément pertinent."Selon la législation actuelle, "tout enfant né sans vie doit être déclaré lorsque la durée de la grossesse atteint au moins 180 jours", ce qui implique notamment la reconnaissance du statut d'enfant mort-né, l'obligation de funérailles et l'octroi d'une allocation de naissance.Le Pr. Donner estime par ailleurs que les récentes interventions du Centre d'action laïque (CAL) sont pertinentes. Selon ce dernier, l'ambition de modifier le Code civil de manière à offrir un statut pour l'enfant mort-né procède "insidieusement" d'une intention "idéologique" de "fragiliser les motifs à la base de la dépénalisation de l'avortement". Si l'interruption volontaire de grossesse peut avoir lieu jusque 12 semaines, l'interruption médicale de grossesse peut en revanche être pratiquée jusqu'au terme de la gestation, spécifie la cheffe de clinique.