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Le journal du Médecin : Que pensez-vous du constat principal du KCE, à savoir qu'il y a un certain nombre d'examens préopératoires pas vraiment indispensables, comme notamment la radiographie du thorax ? Cela vous paraît-il EBM ?Dr Baudouin Mansvelt : ça fait longtemps qu'on réalise de nombreux examens plus par routine que par nécessité... Sur la question de savoir si c'est EBM, je dirais qu'il me semble que le travail [du KCE] a été fait convenablement. Maintenant, l'EBM n'existe pas dans certains cas. Par exemple, dans le cas de l'appendicectomie, aucune EBM ne se penche sur l'équation "pas d'appendicectomie versus pas d'antibiotiques". L'EBM existe uniquement dans le cas "pas d'appendicectomie versus antibiotiques". Ceci dit, personne ne peut remettre en question l'intérêt médical de l'appendicectomie. Personnellement, beaucoup d'examens servent de parapluie, plus pour se donner bonne conscience que pour la réelle efficacité de ces examens. En revanche j'ai une remarque au sujet de l'anesthésie préopératoire. Selon moi, c'est fondamental. Voici quelques années, un travail a été mené au sujet des anesthésistes belges et qui montrait une différence nord-sud (le sud admet qu'une consultation préalable d'anesthésie doit avoir lieu, alors que le nord ne le prévoit que dans 10-15% des cas). Or tout leur argumentaire repose sur le fait que les patients ont subi une anamnèse très poussée chez l'anesthésiste préalablement. Cela doit être souligné. Combien d'économies pourrait-on escompter de l'évitement de ces examens ; et n'est-ce pas, en réalité, le but premier ?-A cette question je dirais que si l'économie faite sur des examens préopératoires est utile si elle peut être réinjectée dans la consultation préopératoire. C'est important à souligner car on pourrait faire une consultation préopératoire systématiquement. Mais elle n'est pas systématiquement remboursée, sauf dans les cas opérés en one-day. Mais dans le cas d'un pancréas, il n'y a pas de consultation préopératoire financée. L'application téléchargeable en ligne d'aide à la décision proposée par le KCE vous paraît-elle empiéter sur la compétence des médecins ? -Je n'ai pas pu la tester encore mais le principe est bon. Le fait d'avoir une application facilement téléchargeable en ligne permet de mieux stratifier les patients. Le chirurgien parfois s'interroge sur la pertinence de certains examens. Cela permet aussi d'éviter les conflits préopératoires avec par exemple l'anesthésiste. Je ne pense pas du tout que cela empiète sur la compétence des médecins. Une remarque tout de même : ce serait utile d'ajouter les médicaments qui devraient être interrompus, et avec quel délai. De plus en plus, nous utilisons des médicaments particuliers qu'il faut arrêter après cinq jours...Le KCE suggère que le Conseil national de promotion de la qualité (CNPQ) "fournisse aux hôpitaux belges, sur la base de recommandations publiées dans ce rapport, un feedback au sujet de leur recours aux examens préopératoires" comme ce fut le cas en 2004. Utile ?-Que les gens prennent connaissance de leur profil est une bonne chose. Le fait que ce soit signalé dans un rapport également. Le feedback doit être donné aux chirurgiens et anesthésistes concernés. Qu'on fasse un peu plus d'électro dans leur institution par exemple est intéressant. Mais que ce soit publié à grande échelle est probablement abusif. Sinon, que reprochez-vous précisément au KCE ?-Souvent, il a eu tendance à prendre des exemples allant dans le sens voulu d'avance avec donc des idées préétablies, insufflées d'ailleurs par le monde politique. Par exemple, le pancréas, il est "évident" qu'il faut en faire un certain nombre [pour être compétent]. Mais je suis surpris qu'on arrive à ces évidences puisque pour un pancréas, la médiane de survie est de 12 mois pour un patient curatif. "Faire" moins de 12 mois de survie pour ce type de patient curatif, c'est quand même un peu difficile. Mais on nous dit qu'en concentrant plus [les activités] ça ira mieux... Comme je le dis à mes assistants, en littérature scientifique, on peut trouver des arguments pour ou contre qui étayent une version ou l'autre. Au KCE, ils ne sont pas toujours 100% honnêtes. Mais ce travail-ci va clarifier pas mal de choses...