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L'idée phare de la réforme du financement des hôpitaux ? Un budget ouvert, avec des forfaits par admission selon les pathologies ou les APR-DRG (All Patient Refined Diagnosis Related Groups). Mais cette flexibilité comporte des risques financiers qu'il faut maîtriser à tout prix, estiment les experts du KCE.Le KCE a analysé les pratiques de cinq pays européens - Allemagne, Estonie, France, Hongrie, Italie - pour identifier les mécanismes de contrôle budgétaire adaptés à un système à budget ouvert. La conclusion est sans appel : il faut choisir entre réduire les tarifs, plafonner les volumes, ou plafonner les prix en fonction des volumes. Depuis dix ans, le financement des hôpitaux fait l'objet de débats sans fin. Le système actuel repose sur un budget des moyens financiers (BMF) fermé pour les frais fixes et un budget ouvert pour les prestations médicales. Résultat ? Une surproduction encouragée par des incitants pervers, estime le KCE : "Certains hôpitaux gonflent leurs activités tandis que les médecins imposent des suppléments aux patients." La transparence est inexistante, l'équilibre budgétaire, un lointain souvenir.Le basculement vers un financement par forfaits pour chaque admission (APR-DRG) a déjà commencé pour les soins à basse variabilité. Mais étendre ce modèle aux autres types de soins exige une discipline budgétaire rigoureuse. Sans garde-fous, le budget national des hôpitaux risque de déraper. Alors, comment éviter le chaos financier tout en répondant à une demande croissante de soins ?Les études du KCE montrent que les pays européens utilisent trois méthodes principales pour contenir leurs dépenses hospitalières :La réduction des tarifs (France) : Si le budget national est dépassé, les tarifs par DRG sont réduits l'année suivante. C'est brutal, imprévisible et pousse les hôpitaux à rogner sur la qualité des soins.Le plafonnement du volume (Italie-Lombardie) : Un seuil maximal d'admissions est fixé. Au-delà, les hôpitaux ne sont plus rémunérés. Problème : cela limite l'accès aux soins et allonge les listes d'attente.Le plafonnement des prix en fonction du volume (Allemagne, Hongrie, Estonie) : Une fois un certain nombre d'admissions atteint, les hôpitaux continuent à être payés, mais à des tarifs dégressifs. C'est la solution la moins mauvaise : elle maintient l'accès aux soins tout en contrôlant le budget global. Les experts belges voient dans ce dernier mécanisme une issue pragmatique. Pourquoi ? Parce qu'il évite les coupures brutales tout en imposant une discipline budgétaire. Le financement reste lié à l'activité, mais les abus sont limités.Toutefois, un plafonnement des prix en fonction du volume ne se met pas en place sur un coin de table. Pour qu'il fonctionne, plusieurs conditions doivent être remplies, d'après le KCE : des seuils réalistes doivent être définis pour refléter les besoins réels en soins, sous peine de générer des listes d'attente interminables. L'application de ces seuils doit être claire et transparente, avec une décision adaptée au niveau national, régional, par réseau hospitalier ou par hôpital individuel. La lutte contre les fraudes est également essentielle : des mécanismes de contrôle stricts doivent être prévus pour éviter les manipulations de codage à des fins financières.Enfin, il est crucial " de prévoir des ressources suffisantes pour assurer la collecte et l'analyse des données, les mises à jour régulières et les audits nécessaires au bon fonctionnement du système ".La réforme du financement hospitalier ne se résume pas à choisir un mécanisme de contrôle. Il faut aussi définir la part du financement par APR-DRG, déterminer quels services seront exclus, et établir des critères de calcul clairs pour les forfaits. La qualité des soins ne doit pas être sacrifiée sur l'autel de l'équilibre budgétaire, reconnaissent les experts.Le chemin est étroit, mais une chose est sûre pour le KCE : continuer avec le système actuel est une impasse. " Une réforme sérieuse, équilibrée et transparente est la seule façon de garantir un financement hospitalier à la hauteur des enjeux du XXIème siècle. "Le rapport scientifique ainsi que la synthèse sont à retrouver ici.