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Je vous rassure tout de suite, et je parle en connaissance de cause , la grande majorité d'entre nous gagne beaucoup moins que cela! Cher Mr Hermesse, je suis tout à fait d'accord avec vous, soyons transparents !Laissez-moi donc vous résumer le parcours que nous faisons comme médecin. Tout d'abord , 7 (maintenant 6) ans d'études. Si nous avons de la chance, financées par papa et maman. Sinon, jobs d'étudiants et prêts à la banque sont là pour nous. Ensuite la spécialisation, entre 3 et 5 voire 7 ans durant lesquels nous avons un salaire modique (moins qu'un infirmier) et qui ne comprend ni cotisation pour la pension, ni pécule de vacances ou 13e mois, ni cotisation pour une éventuelle incapacité de travail.Enfin, nous voilà médecins généralistes ou spécialistes. Nous avons là un métier passionnant mais chargé de responsabilités (tant humaines que juridiques) et d'heures de travail sans compter les gardes et la continuité des soins (appels, sms, courriels).Qui plus est, dans notre pratique quotidienne, nous sommes confrontés à la pauvreté et l'indigence. Une mère seule avec ses deux enfants qui ne sait pas comment elle va terminer son mois, les familles qui ne prennent jamais de vacances et celles qui mangent des pâtes dès le 15 du mois. Mr Hermesse, que croyez-vous que nous faisons dans ces cas là? Nous soignons ces gens, et s'ils ne peuvent pas payer, nous leur demandons le ticket modérateur et 1 euro ou 2 ou ce qu'ils savent donner. C'est comme cela que je conçois ma pratique, et c'est également ainsi que font la majorité de mes confrères et consoeurs, toutes spécialités confondues, en ce y compris tous mes collègues généralistes que vous ne semblez pas inclure dans votre grand plan de " transparence ".Certains d'entre nous pratiquent également ce que j'appelle la " politique du Robin des Bois ", ils demandent des suppléments aux plus aisés et ne font pas payer ceux qui sont dans le besoin, ce qui permet de repartir les frais.Parlons d'ailleurs des suppléments, ils gonflent les revenus bruts de certains spécialistes mais sont en réalité en grande partie ponctionnés par l'hôpital ( c'est la rétrocession d'honoraires ) et servent également à acheter du matériel et à embaucher du personnel qualifié.Alors, après tout cela, je vous l'accorde, sinon je serais de mauvaise foi, certains médecins spécialistes gagnent plus que 250.000 euros par an. Peut-être ceux-ci estiment-ils qu'ils ont développé une expertise et un savoir-faire tel que cela mérite d'être valorisé. Peut-être ont-ils acquis cette expertise de haute lutte après des formations coûteuses à l'étranger. Peut-être également travaillent-ils sans compter , victimes de leur " workaholisme ". Mais finalement, le patient reste au bout du compte libre et maître de ses choix, il peut donc décider de continuer à aller chez ce médecin ou en changer.Ne vous y trompez pas : nous ne nous plaignons pas. Nous gagnons bien notre vie, nous pouvons partir en vacances et ne pas nous serrer la ceinture à la fin du mois. Mais il ne faut tout de même pas exagérer dans les insinuations et les fausses informations que l'on fait passer dans le grand public. Arrêtez de nous faire passer pour ce que nous ne sommes pas. Nous, médecins, demandons que les politiques et les personnalités publiques, telles que vous, permettent la sérénité des débats et encouragent le développement de notre mission principale : celle du soin.Caroline Depuydt, psychiatre à Epsylon ASBL