Les médecins voient de plus en plus souvent arriver dans leur cabinet des patients qui ne maîtrisent pas ou guère le français, le néerlandais ou l'anglais... ce qui rend évidemment la communication passablement problématique.
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Face à ce constat, le SPF Santé publique a décidé de lancer un projet pilote qui permet aux généralistes de faire appel, par appel vidéo interposé, aux services d'un médiateur interculturel.Bien des médecins de famille belges sont amenés à traiter au quotidien des patients issus de l'immigration - en particulier dans les grands centres urbains, évidemment, mais aussi de plus en plus dans les villes et communes plus modestes.La différence de langue ou de culture peut représenter un obstacle bien réel dans la communication avec le généraliste. "Il ressort de la littérature que les patients qui se trouvent dans cette situation attendent souvent plus longtemps avant de consulter. En outre, les difficultés à se comprendre peuvent déboucher sur une évaluation erronée de la maladie, sur un mauvais usage des médicaments ou sur une piètre compliance", rappelle Hans Verrept, chef de la cellule médiation interculturelle et support de la politique au SPF Santé publique.Il est évidemment possible de faire appel à un interprète (en personne ou par téléphone), mais cela demande une certaine organisation (il est p.ex. souvent nécessaire de prendre rendez-vous à l'avance) et ce n'est évidemment pas gratuit, ce qui explique sans doute que cela reste assez peu fréquent en médecine générale. "Certains patients viennent aussi avec un parent ou ami qui servira d'interprète, mais ils risquent alors de censurer leur discours par gène ou par réticence à étaler leur vie privée devant lui", explique Hans Verrept.D'autres choisissent de sauter purement et simplement la case "médecine générale" pour se rendre directement à l'hôpital, où il y a des médiateurs interculturels financés par le SPF Santé publique - souvent des paramédicaux ayant évidemment bénéficié d'une formation de base aux techniques d'interprétation. "La diversité linguistique a toutefois tellement augmenté au cours des dernières décennies que chaque établissement devrait pouvoir faire appel à toute une brochette de médiateurs, ce qui n'est pas possible d'un point de vue budgétaire", poursuit Hans Verrept. C'est là qu'intervient le principe de la vidéoconférence. "Grâce à ce système, le médiateur interculturel n'a plus forcément besoin de se déplacer et il peut aider plusieurs soignants et/ou patients au cours d'une journée." Au vu du succès rencontré par cette formule, le SPF a décidé de lancer un projet-pilote similaire en médecine générale. Pour ce faire, il est actuellement à la recherche de 120 candidats.La généraliste gantoise Fien Mertens est convaincue de longue date du bien-fondé du recours à un interprète ou à un médiateur interculturel - un service qu'elle utilise depuis 17 ans déjà, travaillant dans une maison médicale qui accueille de nombreux patients turcs, bulgares, russes, afghans, syriens, irakiens et iraniens."Il est évident qu'un médecin ne peut dispenser des soins de qualité que s'il comprend son patient", rappelle le Dr Mertens. Au-delà des barrières linguistiques proprement dites, les médiateurs interculturels devraient également être en mesure de lever les éventuels obstacles sociaux et culturels. "Dans les faits, nous remarquons néanmoins qu'il n'est pas toujours facile pour eux de faire passer le message comme nous l'entendons. Aborder ouvertement des questions comme la mort et les soins de fin de vie, par exemple, est beaucoup plus délicat dans certaines cultures."La généraliste sollicite ses interprètes/médiateurs aussi bien par téléphone que par vidéoconférence. "Le grand avantage de la seconde est qu'elle permet de prendre également en compte la communication non verbale. L'interprète ou médiateur peut ainsi tirer certaines informations de la manière dont le patient s'exprime... et le médecin voit aussi plus facilement s'il a bien compris le message à traduire." Elle suppose toutefois évidemment de disposer d'une bonne connexion internet et d'un ordinateur avec webcam, mais aussi de maîtriser les programmes de vidéoconférence. "L'effort doit venir des deux côtés : le médecin doit être prêt à faire un effort, mais le système doit aussi être convivial."En pratiqueUne réaction rapide étant parfois d'une importance vitale, des "permanences" sont prévues pour les langues les plus demandées ; un médiateur est donc disponible en continu pour l'arabe, le russe et le turc de 9 à 12h et de 13h30 à 16h30 (et pour le roumain en matinée côté francophone). Pour les autres langues, le système fonctionne sur rendez-vous. Il n'y a pas (encore) de permanences et soirée. Les demandes transitent par l'appli intercult.be.La participation au projet-pilote est entièrement gratuite. Intéressé(e) ? Vous trouverez prochainement de plus amples informations dans votre ehealthbox !