Quelques-uns ont fermé, ce dont ont bénéficié aussitôt les maisons plus récentes, ou ayant été épargnées par la pandémie. Les vaccins ont ramené la sérénité des soins et une certaine normalité. Les draps souillés s'amoncellent à nouveau sur chaque palier après la nuit comme avant, leur odeur âcre le disputant aux arômes du café matinal. C'est l'heure des infirmières aux étages, et de l'écoute des plaintes au seuil d'une nouvelle journée. Ici on se dispute une place à table, la possession d'un calendrier, la position d'une chaise de chevet, ça chuchote, ça soupire et s'enquiert avec inquiétude de la distribution des médicaments.

Que n'a-t-on pu écrire sur la résilience, dans les maisons de repos, la fatigue des équipes de soin. Mais ce matin, une patiente qui chante combat toutes les courbes statistiques.

Soudain je tends l'oreille, intrigué par quelques notes aériennes. D'une chambre ouverte, une mélodie s'échappe, portée par une voix éraillée. Elle parle d'un amour qui a envahi une existence et qui l'occupera à jamais. Elle évoque une époque heureuse où vingt ans riment avec toujours, où les arbres en fleurs bruissent au soleil. Catherine chante. On la dit un peu fêlée pour chanter seule ainsi. Elle n'en a cure : ce matin, comme tant d'autres auparavant, la vie s'est réveillée en elle avec les oiseaux, avec un soleil radieux qui paraît ne s'être levé que pour elle. En chantant, elle leur rend hommage, ainsi qu'à la vie. Que n'a-t-on pu écrire sur la résilience, l'immunité de groupe, la levée des barrières sociales dans les maisons de repos, la fatigue des équipes de soin. Mais ce matin, une patiente qui chante combat toutes les courbes statistiques.

Quelques-uns ont fermé, ce dont ont bénéficié aussitôt les maisons plus récentes, ou ayant été épargnées par la pandémie. Les vaccins ont ramené la sérénité des soins et une certaine normalité. Les draps souillés s'amoncellent à nouveau sur chaque palier après la nuit comme avant, leur odeur âcre le disputant aux arômes du café matinal. C'est l'heure des infirmières aux étages, et de l'écoute des plaintes au seuil d'une nouvelle journée. Ici on se dispute une place à table, la possession d'un calendrier, la position d'une chaise de chevet, ça chuchote, ça soupire et s'enquiert avec inquiétude de la distribution des médicaments.Soudain je tends l'oreille, intrigué par quelques notes aériennes. D'une chambre ouverte, une mélodie s'échappe, portée par une voix éraillée. Elle parle d'un amour qui a envahi une existence et qui l'occupera à jamais. Elle évoque une époque heureuse où vingt ans riment avec toujours, où les arbres en fleurs bruissent au soleil. Catherine chante. On la dit un peu fêlée pour chanter seule ainsi. Elle n'en a cure : ce matin, comme tant d'autres auparavant, la vie s'est réveillée en elle avec les oiseaux, avec un soleil radieux qui paraît ne s'être levé que pour elle. En chantant, elle leur rend hommage, ainsi qu'à la vie. Que n'a-t-on pu écrire sur la résilience, l'immunité de groupe, la levée des barrières sociales dans les maisons de repos, la fatigue des équipes de soin. Mais ce matin, une patiente qui chante combat toutes les courbes statistiques.