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La première adresse à l'Union européenne porte sur les efforts nécessaires afin d'éliminer ou réduire les inégalités via la réalisation d'un " socle européen des droits sociaux ". Le risque est ici que la libre circulation des biens et des personnes ne menace les protections sociale et sanitaire. Les traités européens prescrivent une forme de modèle social européen mais 17% des Européens vivent sous le seuil de pauvreté. Les mutuelles appuient donc la mise en place d'un véritable cadre européen de protection sociale avec notamment un mix d'allocations et d'indemnités minimum décent à hauteur de 60% du niveau de vie médian dans chaque État-membre. Les mutuelles proposent également d'utiliser non plus seulement le produit intérieur brut comme mesure de la situation économique mais aussi un indicateur de bien-être.La deuxième demande vise à reconnaître les mutuelles comme des acteurs majeurs en vue de la réalisation d'une " économie sociale forte ". Les mutuelles estiment "incarner des entreprises de l'économie sociale source de richesses car porteuses de solutions durables pour l'économie face au modèle économique dominant ". Leur objectif n'est pas le profit immédiat mais la contribution à l'intérêt général. Les mutuelles proposent qu'on liste les obstacles juridiques qui limitent leur potentiel à développer des activités au sein du Marché unique. On pourrait à cet égard reconnaître le concept de " lucrativité limitée ".Troisièmement, les mutuelles demandent que les accords commerciaux soient conclus dans la transparence et le respect du modèle social européen et des droits humains. À cet égard, il faut savoir que l'agenda commercial européen " stimule la libéralisation des soins de santé au sein du marché unique européen par l'introduction des forces du marché, y compris concernant les soins de santé belges ". Les mutuelles craignent comme la peste les jurisprudences parallèles pour régler les litiges commerciaux tels que l'ISDS (Investor-State Dispute Settlement) ou le MIC (Multilateral investment Court). Les mutuelles attendent de l'Europe que des études d'incidence soient réalisées pour vérifier " ou, si et comment les mesures commerciales respectent [notamment] l'accès aux soins de santé ". Les accords commerciaux doivent donc être soumis à temps aux parlements respectifs. " La santé prime sur les intérêts économiques ", clament les mutuelles.Quatrième doléance : implémenter un agenda numérique qui réponde aux véritables défis de santé publique et qui soutienne des systèmes de santé accessibles et efficaces.La révolution digitale représente, pour les mutuelles, non une finalité mais un moyen. L'agenda européen prévoit de mettre les données santé européennes en commun via les DMI pour nourrir l'intelligence artificielle (IA) européenne afin d'améliorer les diagnostics notamment en matière de cancer. Les mutuelles souscrivent à cette révolution mais posent des balises : l'IA ne doit pas être uniquement lucrative, il faut développer un cadre éthique pour protéger les données de santé et l'IA ne doit pas déboucher sur des réductions de budget et de personnel médical. Il faut viser un format européen d'échange des DMI, tels l'EESSI (système d'échange électronique d'informations sur la sécurité sociale).Cinquièmement : les États-membres doivent être encouragés à améliorer la santé publique. " Une bonne santé constitue un droit fondamental dans un État démocratique ", posent les mutuelles. C'est ici qu'intervient la " littératie en santé ", soit la mise à disposition de données et connaissances au patient pour lui permettre de mieux gérer sa santé et d'être plus autonome dans le système de santé. Une mauvaise littératie déboucherait en effet, selon plusieurs études, sur des coûts de santé élevés. En phase avec la santé environnementale, les mutuelles suggèrent que l'Union améliore les taux de vaccination, réglemente l'alimentation et maîtrise la pollution de l'air via des normes strictes telles que définies par l'OMS.Enfin, les mutuelles espèrent que l'UE fasse coopérer ses membres afin d'améliorer l'accessibilité financière des médicaments. Ceci passe par " une coopération accrue entre les organes régulateurs, les agences d'évaluation des technologies de la santé des États-membres". Beneluxa (entente entre Belgique, Pays-Bas, Luxembourg et Autriche) va dans le bon sens. Une Agence européenne pour les maladies rares serait utile ainsi qu'un Fonds européen, financé par l'industrie, pour la recherche pharmaceutique et la production de médicaments.À cet égard, on sentait bien lors du débat les nuances extrêmes entre l'Open-VLD, plus proche des options " libérales " de la commission européenne et le PS se focalisant sur le double langage de l'Allemagne qui contrôle la Commission européenne de près via sa nouvelle présidente, Ursula von der Leyen. Transposé à l'extrême complexité politique européenne, tout cela promet...