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Depuis 2011, la sûreté nucléaire est au centre des discussions, notamment en Europe. Rapidement après la catastrophe, les centrales nucléaires de l'Union européenne ont été soumises à un examen de sûreté dénommé stress-test . " Cependant, les plans d'urgence externes destinés à limiter autant que possible les conséquences d'un accident nucléaire sur l'Homme et l'environnement n'ont pas encore fait l'objet d'une telle analyse ", rapporte le Conseil supérieur de la Santé1.Fort de ce constat, le CSS a procédé à un examen critique du plan d'urgence belge, tirant les leçons de l'accident de Fukushima, mais également de Three Mile Island (1979) et de Tchernobyl (1986). De cet examen ressortent 20 recommandations sur les actions nécessaires visant à prévenir ou gérer un accident nucléaire.En bref, le Conseil plaide pour un réajustement de la politique de sûreté nucléaire en fonction, entre autres, d'une analyse de la vulnérabilité. Cette analyse vise à identifier tous les éléments qui peuvent jouer un rôle aggravant au cours d'un accident. C'est notamment le cas de l'évacuation d'hôpitaux. Les hôpitaux sont-ils prêts ? Le constat est clair : il faut prêter davantage attention à la coordination médicale et aux personnes vulnérables dans les situations de crise. Le processus du plan d'urgence nécessite l'implication des prestataires de soins au sens le plus large et de consacrer une attention particulière aux groupes vulnérables, surtout lorsqu'une évacuation est nécessaire.Cependant, " il n'est pas clair qu'un personnel suffisant soit disponible pour s'occuper des personnes vulnérables ", regrette le Conseil, qui se demande si le personnel (para)médical et les secouristes sont suffisamment préparés à remplir leur rôle en cas de catastrophe nucléaire et si la coordination par les autorités médicales compétentes est suffisante à cet égard.Le Conseil recommande, pour pallier ce problème, d'identifier ces personnes vulnérables. " Pour ce faire, il faut former suffisamment les secouristes et les équiper afin de pouvoir s'occuper des personnes vulnérables. "Autre recommandation notable : l'élargissement des zones de planification. 20 km au moins pour l'évacuation, 100 km au moins pour la distribution rapide d'iode non radioactif aux populations cibles, ainsi que pour la mise à l'abri. Trois points clés Outre ces recommandations, il ressort de l'avis du CSS trois conclusions essentielles. Premièrement, il faut prendre conscience qu'un accident nucléaire sévère peut vraiment se produire en Belgique.Deuxièmement, il faut réaliser l'envergure d'un accident nucléaire grave. D'autant plus que " la Belgique est l'un des pays les plus densément peuplé. Et le parc nucléaire est important. Que ce soit à l'intérieur du pays, ou aux frontières ", explique le professeur Gilbert Eggermont (VUB).Ainsi à Fukushima, malgré des circonstances météorologiques favorables (les conséquences auraient été bien plus graves si le vent n'avait pas soufflé la plupart du temps vers l'océan), des zones situées à 30 km et plus ont dû être évacuées. En Belgique, un tel accident pourrait toucher jusqu'à un million de personnes et des territoires abritant d'importantes activités économiques ainsi que des noeuds de trafic européen.Troisièmement, un accident nucléaire peut avoir des retombées sur de très nombreuses années et rendre certaines zones inhabitables pendant plusieurs générations. Il faut 30 ans pour que la radioactivité du Césium 137, principal contaminant, diminue de moitié dans l'environnement. Le tissu social et économique des régions touchées serait gravement perturbé, évidemment. Mais il faut également prendre en compte les conséquences psychosociales (symptômes de stress, dépressions, suicides) et sanitaires, et ce à court, moyen et long termes. Les maladies liées directement à l'exposition aux radiations ionisantes sont nombreuses : cancers de différents types (particulièrement chez les enfants exposés), pouvant survenir rapidement (leucémies) mais souvent des décennies plus tard (effets héréditaires dans la descendance, dommages à l'embryon et au foetus, cataractes, affections cardiovasculaires, etc.).