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"L'IA n'existe pas tant que nous n'avons pas décidé qu'elle existe. L'IA n'existe pas tant que nous n'avons pas créé l'outil. L'IA ne crée rien. L'IA n'invente rien. L'IA ne déduit rien des données qui l'alimentent. " Nourris d'applaudissement, ces mots de conclusions de la présentation de Luc Julia ont servis de fil conducteur au séminaire du Patient numérique.C'est que l'IA fait peur. Particulièrement à ceux qui ne l'appréhendent pas, entre autres les médecins, réputés technophobes.L'un des éléments qui nourrit cette peur, c'est l'invasion des nouvelles technologies tantôt made in USA, tantôt made in China. Et donc une certaine perte de contrôle de la vieille Europe par rapport aux ogres américains et chinois. " Les data c'est important, mais les algorithmes sont plus importants encore. Les Chinois utilisent des algorithmes, ils ne les inventent pas ", explique Luc Julia. " Ces algorithmes sont pour la plus part inventés en Europe. La raison est simple : les algorithmes sont issus des mathématiques, et en mathématiques, nous sommes très forts. "La numérisation, plus proche des préoccupations du médecin, se cristallise dans l'informatisation des hôpitaux. Là, la situation est à géométrie variable estime le Pr Philippe Kohl, directeur du service des informatiques médico-économiques du CHU de Liège. " Si on regarde le degré de maturité des hôpitaux en termes d'informatisation, c'est assez variable. Les hôpitaux privés et académiques américains sont certainement plus matures. Mais les hôpitaux publics ont plus de difficultés. "Autre pierre d'achoppement : la régulation. " C'est très bien de voir la grande image, avec l'Europe et les États-Unis, mais ici, on est en Belgique, avec des particularités propres ", réagit le Dr Christina Sanida, Chief Medical Information Officer à la Clinique Saint Jean. " Il y a un gap important entre les différentes régions, ce qui pose problème pour communiquer entre nous. J'attends d'experts comme vous de faire levier auprès des politiciens pour définir un cadre qui nous permette d'évoluer au quotidien. "" L'objectif du Patient numérique est de définir des cadres. Cela doit amener nos politiques à réfléchir et à voir dans quel sens aller ", répond Phlippe Kohl. " Il ne faut pas attendre qu'on nous donne plus de moyens, il faut pouvoir faire avec ce que l'on a ", ajoute Frédéric Thys, directeur des urgences au GHDC et responsable académique à l'UCL. " Il faut également penser à la collaboration entre les différentes institutions du pays. "" Le régulateur a toujours 15 ans de retard sur le créateur ", estime pour sa part Luc Julia. " L'avantage, c'est que le régulateur joue le rôle d'éducateur. Le RGPD par exemple, a permis aux gens de prendre conscience de la valeur de leurs données. "La formation est considérée par d'aucuns comme essentielle pour garantir l'humanité de la médecine augmentée. " Pour poser des choix éthiques, pour réfléchir aux stratégies d'emplois des intelligences augmentées, il faut être éveillé ", estime Frédéric Thys. " Plus on sera éveillé tôt à la culture numérique, plus on pourra comprendre de quoi on parle et poser des choix en conséquences. " Et Luc Julia de conclure : " Tous les jours, on entend parler d'IA. Il faut expliquer, évangéliser. Et la formation continue est un moyen utile. L'éducation est la clé dans ce domaine. Il faut comprendre de quoi on parle. Mais est-on capable de faire passer ce savoir ? "