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Journal du Médecin : Avec le recul, que pensez-vous de la fusion réalisée il y a dix ans et de la naissance du GHdC ?Gauthier Saelens : La fusion est une réussite. Un des facteurs qui a contribué à ce succès est la structure simple de l'hôpital. Dès le départ, il n'y a eu qu'un conseil d'administration, un comité de direction - qui n'était pas pléthorique -, un seul conseil médical et un seul conseil d'entreprise. Nous n'avons pas dû composer avec plusieurs organes représentatifs. Ce fonctionnement a été posé dès les premiers mois de la fusion.10 ans après, le personnel a-t-il encore un sentiment d'appartenance aux différents hôpitaux regroupés dans le GHdC ?Gauthier Saelens : Ce serait inexact de dire que les travailleurs ne sont plus attachés à leur institution de base mais il y a aujourd'hui un sentiment manifeste de double appartenance. Ils sont attachés à leur site et collègues et au GHdC.Manfredi Ventura : Une culture commune a été créée. Nous l'avons bien vu lors de la fête d'anniversaire qui a rassemblé de nombreux collaborateurs. La décision de n'avoir qu'un seul numéro d'agrément, un seul médecin-chef et de simplifier au maximum la structure décisionnelle a été judicieuse.Gauthier Saelens : Nous avons très rapidement fusionné les services médicaux en réglant tous les problèmes financiers et les statuts différents. Cette approche nous a permis de libérer la pensée et d'éviter qu'il y ait des non-dits autour d'un projet médical ou de réorientation de l'activité. Après, il était plus simple de parler de rationalisation et de concentration d'activités.Manfredi Ventura : Nous avons voulu regrouper les activités médicales sur un site pour favoriser les collaborations. Le projet de construire un nouvel hôpital a été fédérateur.Gauthier Saelens : Ce projet de construction a été enclenché très rapidement après la fusion, en 2010. Nous avons eu l'intuition que les projets qui avaient été étudiés - le regroupement de l'activité sur deux ou trois sites hospitaliers - n'étaient pas bons. La structure unique est beaucoup plus rationnelle. Nous avons dû ensuite convaincre notre conseil d'administration et concrétiser notre intuition. Petit à petit, le projet s'est mis en oeuvre. Nous avons engagé un chef de projet et pu proposer une stratégie claire.Avez-vous été inspiré par d'autres hôpitaux, qui se sont regroupés, et influencé par la volonté de certains politiciens de réduire le nombre d'hôpitaux ?Manfredi Ventura : Pour créer un outil plus moderne, il fallait réduire le nombre de lits.Gauthier Saelens : Notre objectif était de réduire de 30% le nombre de lits de nos hôpitaux. Nous y arrivons. Le GHdC a suivi la tendance actuelle tout en osant aller plus loin que d'autres acteurs hospitaliers. Notre force est d'avoir un périmètre géographique assez restreint. Nous prenons le risque de perdre un peu de notre part de marché pour pouvoir bâtir un hôpital performant. Tant mieux si nous pouvons conserver toute notre patientèle, voire l'augmenter.Vous cherchez actuellement un directeur médical adjoint. Est-ce que le projet du nouveau GHdC augmente votre attractivité vis-à-vis du corps médical ?Manfredi Ventura : Lorsque des jeunes médecins font un stage chez nous, nous voyons clairement qu'ils sont intéressés par ce projet. Nous avons très peu de problèmes de recrutement sauf dans des disciplines très pointues, par exemple, en neuropédiatrie. Même en gériatrie, discipline où les spécialistes sont rares, nous trouvons facilement des médecins. Comptez-vous développer votre offre médicale dans des polycliniques ?Gauthier Saelens : Nous avons réorganisé notre offre. En plus de Fleurus, Châtelet et Florennes, nous avions une polyclinique à Charleroi et une à Walcourt. Nous avons fermé ces deux dernières et nous en avons ouvert une à Courcelles. Cette offre ambulatoire est importante mais n'est actuellement pas au coeur de notre dispositif. Nous misons davantage sur les soins à domicile. Nous avons lancé trois initiatives : le suivi postnatal par des sages-femmes à domicile, une initiative de chimio à domicile et une d'antibiothérapie à domicile. Il y a une véritable demande pour de tels projets. Nous avons appris à nous ajuster avec les médecins généralistes, les infirmières et les centre de soins à domicile. Nous avons été respectueux de la première ligne.Manfredi Ventura : En collaboration avec la première ligne, y compris les médecins traitants, nous allons étoffer les possibilités de traitement des soins de plaies à domicile. Nous délivrons déjà des formations sur certaines techniques aux infirmières à domicile. Nous avons déjà le leadership dans ce domaine. Cette approche nous permet aussi de réduire le nombre de nos lits. L'hôpital devient un centre qui fournit des actes techniques complexes. Les autres pathologies peuvent être soignées au domicile. L'hôpital a-t-il dégagé des fonds propres pour ces initiatives de HA ?Gauthier Saelens : En effet, nous avons dégagé des budgets spécifiques. Nous n'avons pas encore trouvé notre point d'équilibre sur le plan économique pour ces activités. Nous apprenons beaucoup en développant ces projets. Quelles sont les spécialisations phares du GHdC ?Manfredi Ventura : Le GHdC est organisé autour de treize pôles de soins depuis fin 2017. Toutes les spécialités y sont présentes sauf les greffes et l'oncologie de l'enfant.Et ces pôles ont une autonomie de fonctionnement, de gestion et de ressources humaines.Gauthier Saelens : Nous sommes, dans notre région, le leader dans les traitements des cancers, y compris les chirurgies associées. Historiquement, nous avons un important centre cardiovasculaire et thoracique à Gilly et un grand pôle mère-enfant sur le site Notre-Dame. Dans le nouvel hôpital, nous allons mettre en avant notre pôle peau. Il va englober notre centre des grands brûlés qui est moins sollicité depuis que l'activité industrielle s'est réduite dans la Région. Grâce à l'expertise de ce centre et à notre service de dermatologie, nous pouvons traiter d'autres pathologies. Par exemple, en raison de phénomènes allergiques, des problèmes cutanés sévères nécessitent des prises en charge spécifiques dans des lits utilisés pour les grands brûlés. Avec l'aide du Dr Denis Dufrasne, nous avons monté une banque de peau. Celle-ci a la particularité d'être logée au sein du centre des grands brûlés. Les chirurgiens peuvent utiliser directement la peau qui est stockée à cet endroit. Nous n'achetons plus de peau à l'étranger.Manfredi Ventura : Nous avons également beaucoup développé la gériatrie qui était moribonde il y a quelques années au GHdC. Les gériatres sont parvenus à retourner la situation. Notre service doit être celui où il y a le plus de gériatres en Belgique. C'est important parce que la gériatrie est la médecine du futur.Le GHdC est-il prêt pour les réseaux hospitaliers loco-régionaux ? Gauthier Saelens : Actuellement, plusieurs réseaux sont en train de se mettre en place. Nous nous inscrivons dans une logique territoriale, socio-économique et démographique. Il est difficile d'aller à l'encontre de cette dynamique. Reste un point important à régler : le statut juridique de ces réseaux. De Verviers à Mouscron, plusieurs responsables hospitaliers se heurtent à ce problème.Pour la plupart des disciplines, la future stratégie des réseaux n'aura pas d'impact sur la conception de notre nouvel hôpital. Ce n'est pas le cas pour les services lourds, par exemple, la radiothérapie ou la néonatologie, pour lesquels il faut prévoir une infrastructure très spécifique. Nous avons prévu un certain nombre de modalités permettant d'augmenter ou de réduire une activité qui devrait à l'avenir être concentrée au niveau d'un réseau.En entretien réalisé par Vincent Claes