La décision autonome de mettre fin à sa vie a fait l'objet d'une loi qui dépénalise et qui conditionne l'euthanasie en Belgique. Le coma, situation clinique d'abolition de la vigilance et de la conscience avec une absence totale de réactivité d'un individu vis-à-vis de son environnement, a été inclus parmi les conditions légales qui dépénalisent la décision de mettre un terme à l'existence d'une personne s'il en a exprimé la volonté dans une déclaration anticipée et si la perte de conscience est irréversible. Les recherches en neuroscience ont pu caractériser des états de conscience modifiée qui permettent de prévoir l'évolution d'un patient vers un état de conscience compatible avec une vie de qualité acceptable pour la personne et ses proches.

La question de l'extension des conditions d'euthanasie à des personnes démentes fait l'objet de controverses. La première avancée des neurosciences vient des nouveaux critères de diagnostic des pathologies démentielles, en particulier de la maladie d'Alzheimer. L'utilisation de biomarqueurs permet maintenant de spécifier du vivant du patient la présence lésions cérébrales caractéristiques de la maladie. Les stades précoces d'une maladie démentielle de type Alzheimer dans lesquels le patient est capable d'exprimer sa volonté sous forme de déclaration anticipée rentrent dans le cadre de la loi si l'euthanasie se passe lorsque la personne est encore capable d'en faire la demande de façon "éclairée". Dans les formes modérées, si on considère que le patient n'est plus "capable" de gérer sa vie (de prendre des décisions de gestion de ses biens et de sa santé), il n'est plus légalement apte à compléter le processus d'une euthanasie (il n'est plus capable et "conscient").

Grande variabilité symptomatique

Dans les formes sévères, la difficulté vient de la variabilité symptomatique des pathologies démentielles et par exemple de la maladie d'Alzheimer. Certains soignants (proches ou professionnels) voient dans une forme grabataire de maladie de type Alzheimer une absence de conscience de soi et de l'environnement qui se rapproche de la condition de coma. D'autres en revanche voient toujours la personne derrière le patient dément sévère, désorienté, mais éveillé et présent dans certains contacts.

L'apport des neurosciences vient alors de l'étude de la conscience. Les patients déments présentent des phases de sommeil et d'éveil (consciousness), mais leur conscience d'eux-mêmes et de l'environnement (awareness) peut être perturbée. Ainsi, la démence est fréquemment caractérisée par une diminution de la qualité autonoétique de la mémoire (le souvenir de détails précis concernant des événements personnellement vécus). Assez souvent, la démence s'accompagne également d'une anosognosie de l'importance des changements cognitifs et comportementaux (unawareness of cognitive and behavioral impairment). En revanche, les quelques études réalisée dans des stades sévères de l'affection montrent qu'il persiste une forme de connaissance de soi "présent" comme acteur (d'un choix alimentaire par exemple) ou comme "objet" (d'un soin ou d'une attention par exemple).

Conscience pas unitaire

Il semble donc persister dans la démence une conscience présente, élémentaire de soi qui la différencie de la condition du coma.

On peut en conclure que la conscience n'est pas unitaire et que les termes de la loi sur l'euthanasie méritent d'être discutés lors d'une déclaration anticipée pour que la personne puisse prendre une décision autonome et informée. La condition de coma (perte irréversible de conscience) ne s'applique pas à la condition particulière de la démence de type Alzheimer à un stade sévère, lorsqu'il persiste chez la personne une conscience "centrale" de soi. D'autre part, la présence d'une démence ne peut pas empêcher un patient de demander une euthanasie, parce que l'incapacité et la perte de conscience ne peuvent pas être directement déduites du seul diagnostic de démence.

Allocution faite à la séance thématique sur les problèmes de fin de vie de l'Académie royale de médecine du 21 octobre 2017.

La décision autonome de mettre fin à sa vie a fait l'objet d'une loi qui dépénalise et qui conditionne l'euthanasie en Belgique. Le coma, situation clinique d'abolition de la vigilance et de la conscience avec une absence totale de réactivité d'un individu vis-à-vis de son environnement, a été inclus parmi les conditions légales qui dépénalisent la décision de mettre un terme à l'existence d'une personne s'il en a exprimé la volonté dans une déclaration anticipée et si la perte de conscience est irréversible. Les recherches en neuroscience ont pu caractériser des états de conscience modifiée qui permettent de prévoir l'évolution d'un patient vers un état de conscience compatible avec une vie de qualité acceptable pour la personne et ses proches.La question de l'extension des conditions d'euthanasie à des personnes démentes fait l'objet de controverses. La première avancée des neurosciences vient des nouveaux critères de diagnostic des pathologies démentielles, en particulier de la maladie d'Alzheimer. L'utilisation de biomarqueurs permet maintenant de spécifier du vivant du patient la présence lésions cérébrales caractéristiques de la maladie. Les stades précoces d'une maladie démentielle de type Alzheimer dans lesquels le patient est capable d'exprimer sa volonté sous forme de déclaration anticipée rentrent dans le cadre de la loi si l'euthanasie se passe lorsque la personne est encore capable d'en faire la demande de façon "éclairée". Dans les formes modérées, si on considère que le patient n'est plus "capable" de gérer sa vie (de prendre des décisions de gestion de ses biens et de sa santé), il n'est plus légalement apte à compléter le processus d'une euthanasie (il n'est plus capable et "conscient").Dans les formes sévères, la difficulté vient de la variabilité symptomatique des pathologies démentielles et par exemple de la maladie d'Alzheimer. Certains soignants (proches ou professionnels) voient dans une forme grabataire de maladie de type Alzheimer une absence de conscience de soi et de l'environnement qui se rapproche de la condition de coma. D'autres en revanche voient toujours la personne derrière le patient dément sévère, désorienté, mais éveillé et présent dans certains contacts. L'apport des neurosciences vient alors de l'étude de la conscience. Les patients déments présentent des phases de sommeil et d'éveil (consciousness), mais leur conscience d'eux-mêmes et de l'environnement (awareness) peut être perturbée. Ainsi, la démence est fréquemment caractérisée par une diminution de la qualité autonoétique de la mémoire (le souvenir de détails précis concernant des événements personnellement vécus). Assez souvent, la démence s'accompagne également d'une anosognosie de l'importance des changements cognitifs et comportementaux (unawareness of cognitive and behavioral impairment). En revanche, les quelques études réalisée dans des stades sévères de l'affection montrent qu'il persiste une forme de connaissance de soi "présent" comme acteur (d'un choix alimentaire par exemple) ou comme "objet" (d'un soin ou d'une attention par exemple).Il semble donc persister dans la démence une conscience présente, élémentaire de soi qui la différencie de la condition du coma.On peut en conclure que la conscience n'est pas unitaire et que les termes de la loi sur l'euthanasie méritent d'être discutés lors d'une déclaration anticipée pour que la personne puisse prendre une décision autonome et informée. La condition de coma (perte irréversible de conscience) ne s'applique pas à la condition particulière de la démence de type Alzheimer à un stade sévère, lorsqu'il persiste chez la personne une conscience "centrale" de soi. D'autre part, la présence d'une démence ne peut pas empêcher un patient de demander une euthanasie, parce que l'incapacité et la perte de conscience ne peuvent pas être directement déduites du seul diagnostic de démence.Allocution faite à la séance thématique sur les problèmes de fin de vie de l'Académie royale de médecine du 21 octobre 2017.