Les fonctions remplies aujourd'hui par la sécurité sociale, et dont nous fêtons cette année les75 ans, étaient précédemment assurées par la famille et les adeptes des religions; la maladie étant encore bien souvent considérée comme une punition... divine.

Après la révolution française, une prise en charge directe de la Santé publique et des soins des pauvres et des indigents par les communes et les commissions des hospices civils financées par les impôts a été développée.

Première société de secours mutuel

La révolution industrielle et le rassemblement des travailleurs salariés dans les villes ont quelque peu changé la donne et ont amené les travailleurs à s'organiser solidairement sur leurs lieux de travail. En Belgique, c'est en 1821 qu'apparaît, dans un café situé près de l'imprimerie fréquenté par les linotypistes de Louvain, la première société de secours mutuel, une organisation initiale financée par la collecte de cotisations des travailleurs afin d'apporter les premiers secours pour ses membres. Ces caisses de secours mutuels vont se développer rapidement dans toutes les entreprises industrielles, minières et manufacturières.

Très rapidement après, fils des mutuelles, naîtront les syndicats afin de défendre de meilleures conditions de travail. Ceux-ci auront toutefois une mission différente et complémentaire: la défense des travailleurs face aux pouvoirs grandissants des patrons d'entreprises et des financiers imposant des conditions de travail inacceptables pour leur santé et leur sécurité.

A la fin du 19e siècle, en Europe et certainement dans notre pays, deux grands courants socio-politiques vont s'affronter. La division de ces tendances est à la base religieuse entre d'une part les ouvriers socialistes et communistes étiquetant les catholiques de bourgeois capitalistes ennemis du peuple et, d'autre part, les travailleurs chrétiens soutenus par le pape Léon XIII et son Encyclique Rerum Novarum incitant les catholiques a aider les ouvriers sous peine de les perdre à jamais.

Cette lutte donnera naissance aux mutualités et aux syndicats chrétiens et socialistes et divisera les forces ouvrières unies initialement dans les entreprises et les services publics. Elles seront aussi à la base dans cette démocratie naissante des partis politiques basés sur les forces mutualistes et syndicales (Parti ouvrier belge et transformation de l'ancien parti catholique).

Pendant de nombreuses années avec un Parti catholique (PSC) et un Parti socialiste (PS) pratiquement toujours au pouvoir, soit ensembles, soit en coalition avec les libéraux, les organismes assureurs à filiation politique ont influenceront majoritairement les décisions en matière de Santé publique et de soins de santé par leur présence légale dans les organismes gérant la sécurité sociale mais aussi par leurs présences dans les cabinets ministériels (voir anciens chefs de cabinet ou même ministres).

Elles ont influencé presque toutes les décisions sanitaires, tant bonnes (accessibilité, tarif des actes raisonnable, arrivée des génériques et biosimilaires, contrôle des bases de remboursement et prix des médicaments, respect des budgets etc.), que moins bonnes (bureaucratie par manque de confiance envers les médecins illustrée par les remboursements de médicaments du Chapitre IV, numerus clausus, exacerbations des réseaux hospitaliers et pharmaceutiques concurrents, assurance maladie complémentaire obligatoire remboursant des dépenses non essentielles...).

CDH désavoué

Aujourd'hui, le CDH désavoué par ses électeurs traditionnels ne veut plus participer à aucun des nombreux gouvernements de notre pays et le Cd&V, dans une situation historiquement basse, va probablement devoir abandonner le réel pouvoir de décision à d'autres partis qui n'ont pas ces liens historiques avec les organisations de la même origine sociale. Seul le Parti socialiste est encore en mesure, en Wallonie et à Bruxelles, de maintenir une situation favorable aux organisations sociales mais les Ecolos qui n'en possèdent pas ou peu, ou encore les libéraux qui ont des liens très distendus avec leurs organisations affiliées, accepteront -ils toujours ces influences habituelle ? En Flandre comme l'a montré la 6e réforme de l'Etat ces liens sont de plus en plus distants.

Va-t-on alors vers une requalification du rôle de l'Etat, historiquement éclairé par les nombreuses commissions et conseils d'avis et appuyé par des professionnels et des scientifiques de haut niveau mieux responsabilisés dans la réalisation de choix en matières sanitaires ?

La ministre précédente a entamé cette démarche en prenant elle-même des responsabilités importantes dans les choix notamment hospitaliers, et en matière d'innovations thérapeutiques techniques ou médicamenteuses (réseaux, risk sharing), tout en limitant les apports financiers de subsidiation des frais administratifs des mutualités.

On peut critiquer ces choix de la ministre mais au moins, malgré les oppositions communautaires, des décisions ont été prises.

La balle est aujourd'hui dans le camp des formateurs et des futurs premiers ministres.

Pour continuer à faire progresser nos soins de santé, pour faire face aux nombreux défis de l'avenir, il faut aussi que chacun retrouve et continue à jouer son rôle.

Etat régulateur bien informé

Un Etat (ou des états) régulateur(s) bien informé(s) par des experts, décisionnel(s) et surveillant le système et ses dérives.

Des organismes assureurs accentuant leur fonction d'incitation de leurs membres à acquérir des réflexes permettant de préserver et d'améliorer leur santé en choisissant un mode de vie et des soins de qualité en défendant l'accessibilité universelle aux soins et les intérêts de leurs affiliés .

Des professionnels de santé jouissant d'un statut satisfaisant et participant à l'élaboration des décisions tout en étant aussi responsables de la qualité et de l'amélioration des soins de santé.

J'en accepte l'augure mais je crains que sous d'autres formes (ASBL nombreuses et subsidiées, associations disant représenter les consommateurs etc.), la recherche impérative du pouvoir ne remette en cause une nécessaire transformation de la gestion de nos soins de santé par ses acteurs principaux.

Les fonctions remplies aujourd'hui par la sécurité sociale, et dont nous fêtons cette année les75 ans, étaient précédemment assurées par la famille et les adeptes des religions; la maladie étant encore bien souvent considérée comme une punition... divine.Après la révolution française, une prise en charge directe de la Santé publique et des soins des pauvres et des indigents par les communes et les commissions des hospices civils financées par les impôts a été développée.La révolution industrielle et le rassemblement des travailleurs salariés dans les villes ont quelque peu changé la donne et ont amené les travailleurs à s'organiser solidairement sur leurs lieux de travail. En Belgique, c'est en 1821 qu'apparaît, dans un café situé près de l'imprimerie fréquenté par les linotypistes de Louvain, la première société de secours mutuel, une organisation initiale financée par la collecte de cotisations des travailleurs afin d'apporter les premiers secours pour ses membres. Ces caisses de secours mutuels vont se développer rapidement dans toutes les entreprises industrielles, minières et manufacturières.Très rapidement après, fils des mutuelles, naîtront les syndicats afin de défendre de meilleures conditions de travail. Ceux-ci auront toutefois une mission différente et complémentaire: la défense des travailleurs face aux pouvoirs grandissants des patrons d'entreprises et des financiers imposant des conditions de travail inacceptables pour leur santé et leur sécurité. A la fin du 19e siècle, en Europe et certainement dans notre pays, deux grands courants socio-politiques vont s'affronter. La division de ces tendances est à la base religieuse entre d'une part les ouvriers socialistes et communistes étiquetant les catholiques de bourgeois capitalistes ennemis du peuple et, d'autre part, les travailleurs chrétiens soutenus par le pape Léon XIII et son Encyclique Rerum Novarum incitant les catholiques a aider les ouvriers sous peine de les perdre à jamais.Cette lutte donnera naissance aux mutualités et aux syndicats chrétiens et socialistes et divisera les forces ouvrières unies initialement dans les entreprises et les services publics. Elles seront aussi à la base dans cette démocratie naissante des partis politiques basés sur les forces mutualistes et syndicales (Parti ouvrier belge et transformation de l'ancien parti catholique).Pendant de nombreuses années avec un Parti catholique (PSC) et un Parti socialiste (PS) pratiquement toujours au pouvoir, soit ensembles, soit en coalition avec les libéraux, les organismes assureurs à filiation politique ont influenceront majoritairement les décisions en matière de Santé publique et de soins de santé par leur présence légale dans les organismes gérant la sécurité sociale mais aussi par leurs présences dans les cabinets ministériels (voir anciens chefs de cabinet ou même ministres).Elles ont influencé presque toutes les décisions sanitaires, tant bonnes (accessibilité, tarif des actes raisonnable, arrivée des génériques et biosimilaires, contrôle des bases de remboursement et prix des médicaments, respect des budgets etc.), que moins bonnes (bureaucratie par manque de confiance envers les médecins illustrée par les remboursements de médicaments du Chapitre IV, numerus clausus, exacerbations des réseaux hospitaliers et pharmaceutiques concurrents, assurance maladie complémentaire obligatoire remboursant des dépenses non essentielles...).Aujourd'hui, le CDH désavoué par ses électeurs traditionnels ne veut plus participer à aucun des nombreux gouvernements de notre pays et le Cd&V, dans une situation historiquement basse, va probablement devoir abandonner le réel pouvoir de décision à d'autres partis qui n'ont pas ces liens historiques avec les organisations de la même origine sociale. Seul le Parti socialiste est encore en mesure, en Wallonie et à Bruxelles, de maintenir une situation favorable aux organisations sociales mais les Ecolos qui n'en possèdent pas ou peu, ou encore les libéraux qui ont des liens très distendus avec leurs organisations affiliées, accepteront -ils toujours ces influences habituelle ? En Flandre comme l'a montré la 6e réforme de l'Etat ces liens sont de plus en plus distants.Va-t-on alors vers une requalification du rôle de l'Etat, historiquement éclairé par les nombreuses commissions et conseils d'avis et appuyé par des professionnels et des scientifiques de haut niveau mieux responsabilisés dans la réalisation de choix en matières sanitaires ?La ministre précédente a entamé cette démarche en prenant elle-même des responsabilités importantes dans les choix notamment hospitaliers, et en matière d'innovations thérapeutiques techniques ou médicamenteuses (réseaux, risk sharing), tout en limitant les apports financiers de subsidiation des frais administratifs des mutualités.On peut critiquer ces choix de la ministre mais au moins, malgré les oppositions communautaires, des décisions ont été prises.La balle est aujourd'hui dans le camp des formateurs et des futurs premiers ministres.Pour continuer à faire progresser nos soins de santé, pour faire face aux nombreux défis de l'avenir, il faut aussi que chacun retrouve et continue à jouer son rôle.Un Etat (ou des états) régulateur(s) bien informé(s) par des experts, décisionnel(s) et surveillant le système et ses dérives.Des organismes assureurs accentuant leur fonction d'incitation de leurs membres à acquérir des réflexes permettant de préserver et d'améliorer leur santé en choisissant un mode de vie et des soins de qualité en défendant l'accessibilité universelle aux soins et les intérêts de leurs affiliés .Des professionnels de santé jouissant d'un statut satisfaisant et participant à l'élaboration des décisions tout en étant aussi responsables de la qualité et de l'amélioration des soins de santé.J'en accepte l'augure mais je crains que sous d'autres formes (ASBL nombreuses et subsidiées, associations disant représenter les consommateurs etc.), la recherche impérative du pouvoir ne remette en cause une nécessaire transformation de la gestion de nos soins de santé par ses acteurs principaux.