Ce 12 décembre, la Chambre a décidé, à la demande de quelque cinquante parlementaires, de solliciter l'avis du Conseil d'État pour la proposition de loi tendant à supprimer le délai de validité de la déclaration anticipée d'euthanasie. Nous sommes donc confrontés à une superbe insécurité juridique.
Point de départ : la loi du 28 mai 2002 relative à l'euthanasie
Les débats au sein du Parlement avaient été contrastés au sujet de la déclaration anticipée tant et si bien que le résultat a été un texte entaché par un formalisme suranné quant à l'exigence de deux témoins lors de la rédaction de celle-ci et un champ d'application trop restrictif. En effet la loi du 28 mai 2002 limite la possibilité de faire appel à la déclaration anticipée lorsque le patient, atteint d'une affection grave et incurable, est inconscient et que sa situation est jugée irréversible en l'état actuel de la science.
Cerise sur le gâteau, la durée de validité de cette déclaration anticipée a été limitée à cinq ans à calculer à partir de la rédaction jusqu'au moment où le déclarant perd la capacité de s'exprimer.
Premier rendez-vous manqué : réouverture des débats en 2013
Certes le législateur a voulu revoir sa copie. Ce fut le cas notamment en 2013. Malheureusement, même si l'on peut saluer l'avancée que l'extension de l'euthanasie aux mineurs a pu constituer, l'amélioration de la déclaration anticipée est restée dans les cartons de l'assemblée. Et pourtant cette question semblait ne plus faire débat.
Amendement à la loi fourre-tout
L'épisode de la loi du 5 mai 2019 portant des dispositions diverses en matière pénale et en matière de cultes, et modifiant la loi du 28 mai 2002 relative à l'euthanasie et le Code pénal social
En fin de législature, un amendement à une loi fourre-tout comme nous les aimons a été déposé visant à supprimer le délai de validité de la déclaration anticipée. C'était trop beau et trop simple. Réaction d'autres parlementaires : ne laissons pas cette occasion à nos collègues de mettre à leur chapeau cette plume que pourrait constituer cette amélioration de la loi. Le résultat fut un texte biscornu où il était question d'une part de porter la durée de validité à 10 ans et d'autres pas de prévoir la possibilité du choix par le déclarant de la durée de validité si celui-ci décidait de faire enregistrer sa déclaration auprès de la Commune. Subtilité : le CD&V a imposé pour que cette loi puisse entrer en vigueur que le gouvernement s'attelle à la rédaction d'un arrêté royal d'exécution avant le 31 décembre 2019. Bonne chance pour les rédacteurs de cet arrêté d'exécution : partir d'un texte aussi alambiqué que celui qui a été voté représentait une mission impossible.
Période postélectorale avec un gouvernement en affaires courantes
Profitant de cette période où les parlementaires ne sont pas nécessairement tenus par les directives des partis liés par une déclaration gouvernementale, une proposition tendant à supprimer la durée de validité de la déclaration a été déposée à l'initiative de parlementaires écolos. Des parlementaires socialistes ont souhaité également apporter une amélioration en ce qui concerne l'exercice de la clause de conscience en voulant préciser que celle-ci ne peut être institutionnelle mais doit rester personnelle et en proposant aussi que le médecin qui entend opposer un refus pour des questions de principe doit le faire dans un délai de sept jours, le dossier médical devant être transféré à un autre médecin dans les quatre jours du refus.
Epreuve de la séance plénière
Le texte était voté en commission de la santé en seconde lecture. Restait l'épreuve de la séance plénière. La parlementaire CD &V Van Hoof a sonné le rappel pour que soient présents au moins 50 membres de l'assemblée plénière à un moment précis, nombre nécessaire pour obtenir que cette proposition de loi soit soumise à l'avis du Conseil d'État. Une fois la chose obtenue, la plupart de ces parlementaires ont quitté l'assemblée plénière et ont été vaquer à leurs occupations.
Bilan au 12 décembre 2019
Nous nous retrouvons donc devant une situation que certains pourraient juger cocasse s'il n'était question du respect de l'autonomie des personnes : d'une part la loi votée en fin de législature dont le sort tient à la publication d'un arrêté d'exécution impossible à rédiger et d'autre part une proposition de loi qui avait le mérite de clarifier la situation envoyée pour avis au Conseil d'État, déjà submergé par la boulimie législative et en manque d'effectifs.
Nous sommes donc confrontés à une superbe insécurité juridique.
Cela ne doit pas décourager les personnes de remplir leur déclaration anticipée d'euthanasie mais elles doivent être conscientes que ce document n'est pas un gage absolu de sécurité que leur volonté soit respectée. Et pour rappel, nul n'est obligé de remplir une déclaration anticipée. Que ceux qui n'entendent pas profiter de cette liberté ne privent pas les autres d'y avoir recours ! Cela ne doit pas non plus occulter le débat le plus important, à savoir la possible extension du champ d'application de la déclaration anticipée. Aux Pays-Bas, la déclaration anticipée n'est pas engoncée dans un carcan. Il est possible de préciser les conditions dans lesquelles les personnes souhaitent que l'euthanasie soit appliquée, par exemple en cas de progression d'une démence qui coupe toute communication avec l'extérieur.
Le débat est loin d'être clos.
Point de départ : la loi du 28 mai 2002 relative à l'euthanasieLes débats au sein du Parlement avaient été contrastés au sujet de la déclaration anticipée tant et si bien que le résultat a été un texte entaché par un formalisme suranné quant à l'exigence de deux témoins lors de la rédaction de celle-ci et un champ d'application trop restrictif. En effet la loi du 28 mai 2002 limite la possibilité de faire appel à la déclaration anticipée lorsque le patient, atteint d'une affection grave et incurable, est inconscient et que sa situation est jugée irréversible en l'état actuel de la science.Cerise sur le gâteau, la durée de validité de cette déclaration anticipée a été limitée à cinq ans à calculer à partir de la rédaction jusqu'au moment où le déclarant perd la capacité de s'exprimer. Premier rendez-vous manqué : réouverture des débats en 2013Certes le législateur a voulu revoir sa copie. Ce fut le cas notamment en 2013. Malheureusement, même si l'on peut saluer l'avancée que l'extension de l'euthanasie aux mineurs a pu constituer, l'amélioration de la déclaration anticipée est restée dans les cartons de l'assemblée. Et pourtant cette question semblait ne plus faire débat.L'épisode de la loi du 5 mai 2019 portant des dispositions diverses en matière pénale et en matière de cultes, et modifiant la loi du 28 mai 2002 relative à l'euthanasie et le Code pénal social En fin de législature, un amendement à une loi fourre-tout comme nous les aimons a été déposé visant à supprimer le délai de validité de la déclaration anticipée. C'était trop beau et trop simple. Réaction d'autres parlementaires : ne laissons pas cette occasion à nos collègues de mettre à leur chapeau cette plume que pourrait constituer cette amélioration de la loi. Le résultat fut un texte biscornu où il était question d'une part de porter la durée de validité à 10 ans et d'autres pas de prévoir la possibilité du choix par le déclarant de la durée de validité si celui-ci décidait de faire enregistrer sa déclaration auprès de la Commune. Subtilité : le CD&V a imposé pour que cette loi puisse entrer en vigueur que le gouvernement s'attelle à la rédaction d'un arrêté royal d'exécution avant le 31 décembre 2019. Bonne chance pour les rédacteurs de cet arrêté d'exécution : partir d'un texte aussi alambiqué que celui qui a été voté représentait une mission impossible. Période postélectorale avec un gouvernement en affaires courantesProfitant de cette période où les parlementaires ne sont pas nécessairement tenus par les directives des partis liés par une déclaration gouvernementale, une proposition tendant à supprimer la durée de validité de la déclaration a été déposée à l'initiative de parlementaires écolos. Des parlementaires socialistes ont souhaité également apporter une amélioration en ce qui concerne l'exercice de la clause de conscience en voulant préciser que celle-ci ne peut être institutionnelle mais doit rester personnelle et en proposant aussi que le médecin qui entend opposer un refus pour des questions de principe doit le faire dans un délai de sept jours, le dossier médical devant être transféré à un autre médecin dans les quatre jours du refus.Le texte était voté en commission de la santé en seconde lecture. Restait l'épreuve de la séance plénière. La parlementaire CD &V Van Hoof a sonné le rappel pour que soient présents au moins 50 membres de l'assemblée plénière à un moment précis, nombre nécessaire pour obtenir que cette proposition de loi soit soumise à l'avis du Conseil d'État. Une fois la chose obtenue, la plupart de ces parlementaires ont quitté l'assemblée plénière et ont été vaquer à leurs occupations.Bilan au 12 décembre 2019Nous nous retrouvons donc devant une situation que certains pourraient juger cocasse s'il n'était question du respect de l'autonomie des personnes : d'une part la loi votée en fin de législature dont le sort tient à la publication d'un arrêté d'exécution impossible à rédiger et d'autre part une proposition de loi qui avait le mérite de clarifier la situation envoyée pour avis au Conseil d'État, déjà submergé par la boulimie législative et en manque d'effectifs.Nous sommes donc confrontés à une superbe insécurité juridique.Cela ne doit pas décourager les personnes de remplir leur déclaration anticipée d'euthanasie mais elles doivent être conscientes que ce document n'est pas un gage absolu de sécurité que leur volonté soit respectée. Et pour rappel, nul n'est obligé de remplir une déclaration anticipée. Que ceux qui n'entendent pas profiter de cette liberté ne privent pas les autres d'y avoir recours ! Cela ne doit pas non plus occulter le débat le plus important, à savoir la possible extension du champ d'application de la déclaration anticipée. Aux Pays-Bas, la déclaration anticipée n'est pas engoncée dans un carcan. Il est possible de préciser les conditions dans lesquelles les personnes souhaitent que l'euthanasie soit appliquée, par exemple en cas de progression d'une démence qui coupe toute communication avec l'extérieur.Le débat est loin d'être clos.