Ces personnes arrivent chez moi avec un gros dossier sous le bras, quelques classeurs remplis de documents, résultats, listes, courriers. Ensuite, leurs yeux sont rivés sur moi. Des yeux remplis d'espoir. " Vous êtes notre dernier espoir. J'espère que vous trouverez quelque-chose. Et que l'on pourra y faire quelque-chose. "

Je peux m'imaginer que tout le monde n'est pas ravi d'un tel scénario. Moi, cela me parle vraiment beaucoup. Le défi du puzzle diagnostique. C'est un des nombreux aspects de l'hématologie qui m'a toujours attirée, et qui me confirme, jour après jour, que l'hématologie était le bon choix pour moi. Cela reste la plus belle spécialité au monde. Pour moi, bien sûr. La complexité, chercher, fouiller, éplucher la littérature, contacter des collègues, se concerter.

Et parfois, je ne trouve rien, malgré les recherches et les fouilles. C'est frustrant par moments, mais je n'abandonne pas. Mes patients le savent. J'ai toute une série de patients en tête qui sont en permanence avec moi lorsque je vais en congrès, lorsque je parle avec des collègues, lorsque je lis des articles. Et cela est déjà arrivé plus d'une fois que je pense: oh, cela, je devrais vérifier chez tel ou tel patient, qui sait. Et parfois, cela s'avère être la solution. La satisfaction est alors grande.

Mais tout aussi souvent, cela n'est pas juste. Reste alors à chercher, sans nécessairement trouver. Retourner à la table de dessin. Et ce n'est non seulement frustrant pour moi, mais d'abord pour le patient et sa famille.

Mais dans ces cas aussi, je remarque que les gens peuvent trouver une certaine paix dans le fait que quelqu'un s'engage à chercher, d'où la frustration s'atténue. Dans ce cas, écouter peut alors suffire. Reconnaître le problème, y accorder de l'attention et chercher des solutions peut, en soi, déjà consoler les patients.

Ecouter demande du temps, et le temps est précisément ce qui devient toujours plus précieux dans notre société actuelle. Nous consacrons de plus en plus de temps à de la paperasserie, à cocher des cases dans une liste. Dans les systèmes de qualité, le temps est un critère qui coule de source, mais on opte trop souvent pour commencer à temps et finir à temps, plutôt que de se demander ce que l'on fait avec ce temps. C'est bien sûr plus difficile à mesurer. En des périodes où l'économie est si importante, le temps, c'est toujours de l'argent. Donc, cela doit aller vite. Et souvent, écouter passe alors au deuxième plan.

Cela semble peut-être un appel quelque peu naïf. Un appel à prendre plus de temps, à écouter attentivement. Avec et sans stéthoscope - car ausculter est aussi écouter, et cela aussi, on le fait peut-être trop rapidement et pas assez.

Demain, c'est mon dernier jour de travail avant les vacances, dans une période particulièrement chargée. Je me réjouis de vivre avec mon mari et notre fils la simplicité du quotidien, de s'écouter, de dessiner et de lire.

Un livre magnifique, que je peux recommander à tout le monde est : 'The boy, the mole, the fox and the horse', de Charlie Mackesy. Il comporte tellement de jolies phrases. Dont une qui convient parfaitement pour refermer cet article: 'Often the best answer to give... is just to listen.'

Tessa Kerre

Hématologue à l'UZ Gent

Ces personnes arrivent chez moi avec un gros dossier sous le bras, quelques classeurs remplis de documents, résultats, listes, courriers. Ensuite, leurs yeux sont rivés sur moi. Des yeux remplis d'espoir. " Vous êtes notre dernier espoir. J'espère que vous trouverez quelque-chose. Et que l'on pourra y faire quelque-chose. "Je peux m'imaginer que tout le monde n'est pas ravi d'un tel scénario. Moi, cela me parle vraiment beaucoup. Le défi du puzzle diagnostique. C'est un des nombreux aspects de l'hématologie qui m'a toujours attirée, et qui me confirme, jour après jour, que l'hématologie était le bon choix pour moi. Cela reste la plus belle spécialité au monde. Pour moi, bien sûr. La complexité, chercher, fouiller, éplucher la littérature, contacter des collègues, se concerter.Et parfois, je ne trouve rien, malgré les recherches et les fouilles. C'est frustrant par moments, mais je n'abandonne pas. Mes patients le savent. J'ai toute une série de patients en tête qui sont en permanence avec moi lorsque je vais en congrès, lorsque je parle avec des collègues, lorsque je lis des articles. Et cela est déjà arrivé plus d'une fois que je pense: oh, cela, je devrais vérifier chez tel ou tel patient, qui sait. Et parfois, cela s'avère être la solution. La satisfaction est alors grande.Mais tout aussi souvent, cela n'est pas juste. Reste alors à chercher, sans nécessairement trouver. Retourner à la table de dessin. Et ce n'est non seulement frustrant pour moi, mais d'abord pour le patient et sa famille.Mais dans ces cas aussi, je remarque que les gens peuvent trouver une certaine paix dans le fait que quelqu'un s'engage à chercher, d'où la frustration s'atténue. Dans ce cas, écouter peut alors suffire. Reconnaître le problème, y accorder de l'attention et chercher des solutions peut, en soi, déjà consoler les patients.Ecouter demande du temps, et le temps est précisément ce qui devient toujours plus précieux dans notre société actuelle. Nous consacrons de plus en plus de temps à de la paperasserie, à cocher des cases dans une liste. Dans les systèmes de qualité, le temps est un critère qui coule de source, mais on opte trop souvent pour commencer à temps et finir à temps, plutôt que de se demander ce que l'on fait avec ce temps. C'est bien sûr plus difficile à mesurer. En des périodes où l'économie est si importante, le temps, c'est toujours de l'argent. Donc, cela doit aller vite. Et souvent, écouter passe alors au deuxième plan.Cela semble peut-être un appel quelque peu naïf. Un appel à prendre plus de temps, à écouter attentivement. Avec et sans stéthoscope - car ausculter est aussi écouter, et cela aussi, on le fait peut-être trop rapidement et pas assez.Demain, c'est mon dernier jour de travail avant les vacances, dans une période particulièrement chargée. Je me réjouis de vivre avec mon mari et notre fils la simplicité du quotidien, de s'écouter, de dessiner et de lire.Un livre magnifique, que je peux recommander à tout le monde est : 'The boy, the mole, the fox and the horse', de Charlie Mackesy. Il comporte tellement de jolies phrases. Dont une qui convient parfaitement pour refermer cet article: 'Often the best answer to give... is just to listen.' Tessa KerreHématologue à l'UZ Gent