Comment se déroule un accouchement, aujourd'hui, en Belgique et en France ? C'est finalement à cette question que l'auteure répond. En partant de son expérience personnelle - un accouchement respecté dit-elle - mais aussi des nombreux témoignages recueillis sur son blog. Trois ans de travail plus tard, Marie-Hélène Lahaye signe ici un recueil pamphlétaire des (mauvaises) pratiques médicales que subissent les parturientes et donne ses recommandations pour un accouchement respectueux des femmes.

Violences obstétricales

Au coeur du livre, les violences obstétricales, terme très en vogue que définit la juriste. " Le terme violence obstétricale est l'aboutissement d'une évolution terminologique désignant les mauvais traitements que subissent les femmes dans les maternités. Le terme est apparu dans le monde francophone après 2010 [...] Je choisis de définir la violence obstétricale comme : tout comportement, acte, omission ou abstention commis par le personnel de santé, qui n'est pas justifié médicalement et /ou qui est effectué sans le consentement libre et éclairé de la femme enceinte ou de la parturiente. "

Le monde hospitalier en ligne de mire

Cette violence faite aux femmes qui accouchent est la norme pour la militante féministe qui ne mâche pas ses mots à l'égard du monde médical. " Il n'est pas question de traiter la médecine en ennemie à abattre. L'obstétrique est une discipline essentielle. De nombreux progrès médicaux ont déjà eu lieu et bien d'autres restent à réaliser. Mais il est temps qu'elle fasse son autodiagnostic, car sauver des vies ne l'autorise pas à impunément en détruire d'autres. "

Pour Marie-Hélène Lahaye, chaque personne étant unique, la meilleure façon d'accoucher varie d'une femme à l'autre. " Le monde médical fait pourtant preuve de beaucoup de mépris à l'égard des choix et préférences des femmes ", regrette-t-elle.

L'accouchement

L'auteure aborde l'accouchement par différents prismes : la peur (celle de la parturiente, celle du chirurgien), mais aussi le point de vue physiologique, soit " ce qu'il se passe dans le corps et l'esprit des femmes lorsque rien ne vient perturber le processus ", rappelant que " les études estiment que l'écrasante majorité des accouchements (90%) sont normaux et ne présentent pas de risques particuliers. Seuls environs 10 % des accouchements sont pathologiques dans les pays occidentaux aujourd'hui. "

L'accouchement à l'hôpital, quant à lui, est représenté par le modèle économique fordiste. " Il implique une division du travail entre les intervenants qui doivent effectuer des gestes précis dans un temps chronométré, selon le principe du travail à la chaîne. Pour que ce modèle puisse fonctionner, il nécessite une standardisation des femmes, qui doivent toutes adopter la même position, et dont les étapes de l'accouchement doivent se dérouler en séquences précises, minutées et de préférence de la façon la plus rapide possible. " Le rôle du personnel consiste à suivre un protocole pour faire entrer les femmes dans des standards par le biais de machines, d'instruments et de gestes précis. " Les émotions et sensations des femmes n'entrent pas en ligne de compte dans la rédaction de ces protocoles, et les besoins affectifs de la mère et de l'enfant ne sont absolument pas prioritaires. "

Le pire, dans le chef de l'auteure, est sans doute que la médicalisation de l'accouchement procède à une inversion des rôles : d'active, la femme devient passive. " L'accouchement médicalisé prive les femmes de toute initiative en les renvoyant à la passivité la plus totale, tandis que l'obstétricien s'approprie l'ensemble des actions permettant de faire naître un enfant. "

Cette substitution serait la cause de grand nombre de complications. L'auteure met en avant le fait que l'obstétrique, si elle sauve des vies, en complique bien d'autres, avec une augmentation d'actes qui n'est pas en corrélation avec une diminution significative de la mortalité périnatale. " Les progrès de la médecine et de l'obstétrique permettent aujourd'hui de faire face à bien des complications fatales ", reconnaît ainsi Marie-Hélène Lahaye. " Malheureusement, en troquant leur blouse blanche contre la tenue de pompiers-pyromanes, les praticiens transforment des accouchements qui se présentaient parfaitement en une succession de complications, entraînant chez les jeunes mères (et chez leurs enfants) des séquelles au corps et à l'âme. Face à ce dévoiement des principes fondamentaux de la médecine, bon nombre de femmes ne devraient plus dire 'je serai morte si je n'avais pas accouché à l'hôpital' , mais plutôt 'à l'hôpital, on a failli me tuer' . "

L'avenir

Il y aurait encore beaucoup à dire sur les constats que tire Marie-Hélène Lahaye. Malheureusement, il y a moins à se mettre sous la dent quand on évoque les solutions ou pistes de solutions à mettre en place. Il y a bien sûr la définition légale des violences obstétricales, citée plus haut, qui pourrait donner lieu à une législation dans le domaine. La matière est légiférée dans trois pays d'Amérique latine (Venezuela, Mexique et Argentine). En Argentine, par exemple, la loi définit depuis 2009 la violence obstétricale comme " celle qu'exerce le personnel de santé sur le corps et les processus de reproduction des femmes, un traitement déshumanisé, l'abus de la médicalisation et la pathologisation des processus naturels. " Pour la juriste, les définitions sud-américaines sont toutefois difficilement applicables en l'état, puisqu'elles appellent des définitions supplémentaires. " En effet, sur base de quels critères objectifs peut-on déterminer si un traitement est déshumanisé ? À partir de combien d'actes techniques considère-t-on qu'il y a abus de médicalisation ? Comment quantifier une perte d'autonomie de la parturiente ? " D'où le choix d'une définition plus englobante.

À côté, la juriste émet quatre revendications féministes : la liberté pour les femmes de choisir les conditions de leur accouchement, l'abolition des violences obstétricales, l'information pour toutes les femmes et la reconnaissance des femmes qui accouchent comme sujets de droits. Ses recommandations, assez peu mises en avant finalement, découlent de ces quatre revendications, et peuvent se résumer en deux phrases : les femmes devraient avoir la possibilité d'avoir un enfant si elles le veulent, quand elles le veulent. Et comme elle le veulent.

Accouchement - Les femmes méritent mieux de Marie-Hélène Lahaye paru chez Michalon, 4 janvier 2018.

Comment se déroule un accouchement, aujourd'hui, en Belgique et en France ? C'est finalement à cette question que l'auteure répond. En partant de son expérience personnelle - un accouchement respecté dit-elle - mais aussi des nombreux témoignages recueillis sur son blog. Trois ans de travail plus tard, Marie-Hélène Lahaye signe ici un recueil pamphlétaire des (mauvaises) pratiques médicales que subissent les parturientes et donne ses recommandations pour un accouchement respectueux des femmes.Au coeur du livre, les violences obstétricales, terme très en vogue que définit la juriste. " Le terme violence obstétricale est l'aboutissement d'une évolution terminologique désignant les mauvais traitements que subissent les femmes dans les maternités. Le terme est apparu dans le monde francophone après 2010 [...] Je choisis de définir la violence obstétricale comme : tout comportement, acte, omission ou abstention commis par le personnel de santé, qui n'est pas justifié médicalement et /ou qui est effectué sans le consentement libre et éclairé de la femme enceinte ou de la parturiente. "Cette violence faite aux femmes qui accouchent est la norme pour la militante féministe qui ne mâche pas ses mots à l'égard du monde médical. " Il n'est pas question de traiter la médecine en ennemie à abattre. L'obstétrique est une discipline essentielle. De nombreux progrès médicaux ont déjà eu lieu et bien d'autres restent à réaliser. Mais il est temps qu'elle fasse son autodiagnostic, car sauver des vies ne l'autorise pas à impunément en détruire d'autres. "Pour Marie-Hélène Lahaye, chaque personne étant unique, la meilleure façon d'accoucher varie d'une femme à l'autre. " Le monde médical fait pourtant preuve de beaucoup de mépris à l'égard des choix et préférences des femmes ", regrette-t-elle.L'auteure aborde l'accouchement par différents prismes : la peur (celle de la parturiente, celle du chirurgien), mais aussi le point de vue physiologique, soit " ce qu'il se passe dans le corps et l'esprit des femmes lorsque rien ne vient perturber le processus ", rappelant que " les études estiment que l'écrasante majorité des accouchements (90%) sont normaux et ne présentent pas de risques particuliers. Seuls environs 10 % des accouchements sont pathologiques dans les pays occidentaux aujourd'hui. "L'accouchement à l'hôpital, quant à lui, est représenté par le modèle économique fordiste. " Il implique une division du travail entre les intervenants qui doivent effectuer des gestes précis dans un temps chronométré, selon le principe du travail à la chaîne. Pour que ce modèle puisse fonctionner, il nécessite une standardisation des femmes, qui doivent toutes adopter la même position, et dont les étapes de l'accouchement doivent se dérouler en séquences précises, minutées et de préférence de la façon la plus rapide possible. " Le rôle du personnel consiste à suivre un protocole pour faire entrer les femmes dans des standards par le biais de machines, d'instruments et de gestes précis. " Les émotions et sensations des femmes n'entrent pas en ligne de compte dans la rédaction de ces protocoles, et les besoins affectifs de la mère et de l'enfant ne sont absolument pas prioritaires. "Le pire, dans le chef de l'auteure, est sans doute que la médicalisation de l'accouchement procède à une inversion des rôles : d'active, la femme devient passive. " L'accouchement médicalisé prive les femmes de toute initiative en les renvoyant à la passivité la plus totale, tandis que l'obstétricien s'approprie l'ensemble des actions permettant de faire naître un enfant. "Cette substitution serait la cause de grand nombre de complications. L'auteure met en avant le fait que l'obstétrique, si elle sauve des vies, en complique bien d'autres, avec une augmentation d'actes qui n'est pas en corrélation avec une diminution significative de la mortalité périnatale. " Les progrès de la médecine et de l'obstétrique permettent aujourd'hui de faire face à bien des complications fatales ", reconnaît ainsi Marie-Hélène Lahaye. " Malheureusement, en troquant leur blouse blanche contre la tenue de pompiers-pyromanes, les praticiens transforment des accouchements qui se présentaient parfaitement en une succession de complications, entraînant chez les jeunes mères (et chez leurs enfants) des séquelles au corps et à l'âme. Face à ce dévoiement des principes fondamentaux de la médecine, bon nombre de femmes ne devraient plus dire 'je serai morte si je n'avais pas accouché à l'hôpital' , mais plutôt 'à l'hôpital, on a failli me tuer' . "Il y aurait encore beaucoup à dire sur les constats que tire Marie-Hélène Lahaye. Malheureusement, il y a moins à se mettre sous la dent quand on évoque les solutions ou pistes de solutions à mettre en place. Il y a bien sûr la définition légale des violences obstétricales, citée plus haut, qui pourrait donner lieu à une législation dans le domaine. La matière est légiférée dans trois pays d'Amérique latine (Venezuela, Mexique et Argentine). En Argentine, par exemple, la loi définit depuis 2009 la violence obstétricale comme " celle qu'exerce le personnel de santé sur le corps et les processus de reproduction des femmes, un traitement déshumanisé, l'abus de la médicalisation et la pathologisation des processus naturels. " Pour la juriste, les définitions sud-américaines sont toutefois difficilement applicables en l'état, puisqu'elles appellent des définitions supplémentaires. " En effet, sur base de quels critères objectifs peut-on déterminer si un traitement est déshumanisé ? À partir de combien d'actes techniques considère-t-on qu'il y a abus de médicalisation ? Comment quantifier une perte d'autonomie de la parturiente ? " D'où le choix d'une définition plus englobante.À côté, la juriste émet quatre revendications féministes : la liberté pour les femmes de choisir les conditions de leur accouchement, l'abolition des violences obstétricales, l'information pour toutes les femmes et la reconnaissance des femmes qui accouchent comme sujets de droits. Ses recommandations, assez peu mises en avant finalement, découlent de ces quatre revendications, et peuvent se résumer en deux phrases : les femmes devraient avoir la possibilité d'avoir un enfant si elles le veulent, quand elles le veulent. Et comme elle le veulent.