La 6e Réforme de l'Etat est la conséquence de la plus longue crise politique qu'ait connu notre pays dans l'histoire récente. Elle vit son épilogue le 6 décembre 2011 après 541 jours de gouvernement en affaires courantes. Deux mois avant, l'accord " papillon " posait les bases de quatre grandes réformes dont le transfert de certaines compétences de l'État fédéral aux entités fédérées (Régions et Communautés). Sa concrétisation logique n'a vu le jour que fin 2013. La partie santé et aide aux personnes concerne 5,089 milliards d'euros à comparer avec le budget de l'Inami avant transfert : 27,861 milliards. Sur ces 5milliards, rappelons que le secteur des maisons de repos et de soins et autres centres de soins de jour prend la plus belle part : 2,976 milliards. Suivent les infrastructures hospitalières et les normes d'agrément des hôpitaux (630 millions), l'allocation d'aide aux personnes âgées (584 millions), une série de conventions en revalidation (279), la santé mentale (208), la prévention et la 1re ligne dont l'aide à l'installation des MG (103)... Le 1er janvier 2019, en principe, tout doit être transféré et assumé par les entités fédérées.

Parmi les défis de la 6e Réforme de l'Etat figure la nécessité de " démultiplier " les représentants des médecins et des mutuelles...

7.000 patients psychiatriques

La répartition du budget transféré entre Régions s'est fait selon une clé population (spécifiquement les personnes de plus de 80 ans pour l'aide aux personnes âgées). Si bien que la Flandre hérite de 61 % des 5 milliards, la Fédération Wallonie-Bruxelles 31 % et Bruxelles 8 %.

Important : on sort de la logique de la sécurité sociale alimentée majoritairement par les cotisations sociales patronales et personnelles. Le financement de ces compétences est assuré par une dotation fédérale répartie entre les budgets généraux des entités. Le principe est la " solidarité extinctive " des entités.

Des millions de gens sont concernés : 130.000 pensionnaires de maisons de repos, 167.000 bénéficiaires de l'allocation d'aide aux personnes âgées, 7.000 patients psychiatriques, les médecins généralistes, un million de 0-16 ans concernés par le calendrier vaccinal, 4 millions de femmes concernées, selon leur classe d'âge, par le dépistage du cancer du sein et de l'utérus et 3,3 millions de personnes concernées par le dépistage du cancer colorectal.

Une Flandre utilitariste

Commençons, une fois n'est pas coutume, par la Flandre. Utilitariste et pragmatique, celle-ci a choisi de quitter la logique paritaire qui fait le sel des interminables négociations à l'Inami pour les matières fédérales. Ainsi, à terme, les mutualités ne seront plus co-gestionnaires des matières de santé gérées désormais par la Flandre. Un peu comme en France et ses caisses régionales d'assurance maladie, les " zorgkassen " remplacent progressivement les mutualités et l'Agence pour les soins de santé reprend les compétences. Les mutuelles sont toutefois présentes au sein de ces caisses. Pendant une période transitoire, les mutuelles et l'Inami assurent la transition.

Toutefois un modèle de concertation tripartite est mis en place concernant la politique bien-être, santé publique et famille. Trois chambres de concertation fonctionnent. La Chambre soins et santé accueille le secteur pour négocier et conclure des accords quant à la politique de santé. Sont présents les prestataires, les utilisateurs (patients), les assureurs soins de santé, les syndicats et le patronat.

Une sécu flamande ( Vlaamse sociale bescherming - VSB) se met en place pour la législature 2014-2019. Les mutualités y jouent un rôle. Voyant dans ses nouvelles compétences une opportunité, la Flandre intégrera progressivement dans sa sécurité sociale l'assurance dépendance (déjà existante), l'aide aux handicapés, l'aide aux personnes âgées, les soins résidentiels pour personnes âgées, les aides à la mobilité, les maisons de soins psychiatriques, les initiatives d'habitation protégée, l'aide aux familles, etc. Chaque Flamand verse 51 euros chaque année pour sa protection sociale. Les Bruxellois flamands s'affilient librement à la VSB moyennant un stage d'attente ramené à 5 ans.

Bruxelles, belle et compliquée

La situation la plus complexe concerne évidemment la Région bruxelloise. Il faut mettre à son crédit le fait qu'elle avait dès 2014 signé un avant-projet d'ordonnance créant un nouvel organisme d'intérêt public (OIP), Iriscare. C'était sans compter la complexité institutionnelle de Bruxelles. Le débat entre une gestion administrative ou paritaire s'est vite crispé au sein du Collège réuni de la Cocom (commission communautaire commune), soit le gouvernement bruxellois dans son ensemble, Flamands et francophones. Ce Collège rassemble, en ce qui concerne les compétences transmises, cinq ministres : Rudi Vervoort (PS), Didier Gosuin (Défi), Céline Fremault (cdH), Guy Vanhengel (Open-VLD) et Pascal Smet (s.pa). Un accord n'est intervenu qu'en juillet 2016.

Finalement, Bruxelles aura un " Comité général de gestion ". Il fixera le budget d'IrisCare et ses grandes orientations. Il sera composé paritairement des syndicats traditionnels, des organismes assureurs, des prestataires de soins et du collège réuni. Les médecins et les mutuelles n'auront droit de vote que sur les matières les concernant.

Les budgets des deux branches, soins de santé et aide aux personnes et, d'autre part, allocations familiales, sont gérés respectivement par le Conseil de gestion des soins de santé et de l'aide aux personnes et le Conseil de gestion des allocations familiales.

Le Conseil de gestion des soins de santé accueille les mutuelles, les médecins, des représentants du patronat et des syndicats, plus deux commissaires du gouvernement et un représentant du conseil consultatif de la Cocom. Sous ce comité de gestion, on a créé quatre commissions techniques : santé mentale, prévention et 1re ligne de soins, accueil et dépendance, et personnes handicapées. Ce sont ces commissions techniques qui font office de médico-mut et de comité de l'assurance. Médecins et mutuelles y signeront des conventions et des accords.

Toutefois, certaines matières échappent à cette gestion paritaire du comité général de gestion d'Iriscare et sont gérées par l'administration de la Cocom : l'entièreté de la politique hospitalière, les soins de santé mentale hors hôpitaux, l'organisation proprement dite des soins de santé de première ligne et le soutien aux professions de 1re ligne.

On assiste donc à une répartition alambiquée des compétences entre IrisCare et l'administration. Toutefois, mutuelles et syndicats de médecin peuvent se réjouir d'être moins sur la touche qu'en Flandre.

Cette structure a plusieurs grands chantiers devant elle, dont le Plan santé bruxellois qui concerne toutes les compétences santé du ressort de la Région bruxelloise. Le ministre Gosuin devrait le rendre public fin avril.

Le cas de la Wallonie dans nos éditions papier.

La 6e Réforme de l'Etat est la conséquence de la plus longue crise politique qu'ait connu notre pays dans l'histoire récente. Elle vit son épilogue le 6 décembre 2011 après 541 jours de gouvernement en affaires courantes. Deux mois avant, l'accord " papillon " posait les bases de quatre grandes réformes dont le transfert de certaines compétences de l'État fédéral aux entités fédérées (Régions et Communautés). Sa concrétisation logique n'a vu le jour que fin 2013. La partie santé et aide aux personnes concerne 5,089 milliards d'euros à comparer avec le budget de l'Inami avant transfert : 27,861 milliards. Sur ces 5milliards, rappelons que le secteur des maisons de repos et de soins et autres centres de soins de jour prend la plus belle part : 2,976 milliards. Suivent les infrastructures hospitalières et les normes d'agrément des hôpitaux (630 millions), l'allocation d'aide aux personnes âgées (584 millions), une série de conventions en revalidation (279), la santé mentale (208), la prévention et la 1re ligne dont l'aide à l'installation des MG (103)... Le 1er janvier 2019, en principe, tout doit être transféré et assumé par les entités fédérées.La répartition du budget transféré entre Régions s'est fait selon une clé population (spécifiquement les personnes de plus de 80 ans pour l'aide aux personnes âgées). Si bien que la Flandre hérite de 61 % des 5 milliards, la Fédération Wallonie-Bruxelles 31 % et Bruxelles 8 %.Important : on sort de la logique de la sécurité sociale alimentée majoritairement par les cotisations sociales patronales et personnelles. Le financement de ces compétences est assuré par une dotation fédérale répartie entre les budgets généraux des entités. Le principe est la " solidarité extinctive " des entités.Des millions de gens sont concernés : 130.000 pensionnaires de maisons de repos, 167.000 bénéficiaires de l'allocation d'aide aux personnes âgées, 7.000 patients psychiatriques, les médecins généralistes, un million de 0-16 ans concernés par le calendrier vaccinal, 4 millions de femmes concernées, selon leur classe d'âge, par le dépistage du cancer du sein et de l'utérus et 3,3 millions de personnes concernées par le dépistage du cancer colorectal.Commençons, une fois n'est pas coutume, par la Flandre. Utilitariste et pragmatique, celle-ci a choisi de quitter la logique paritaire qui fait le sel des interminables négociations à l'Inami pour les matières fédérales. Ainsi, à terme, les mutualités ne seront plus co-gestionnaires des matières de santé gérées désormais par la Flandre. Un peu comme en France et ses caisses régionales d'assurance maladie, les " zorgkassen " remplacent progressivement les mutualités et l'Agence pour les soins de santé reprend les compétences. Les mutuelles sont toutefois présentes au sein de ces caisses. Pendant une période transitoire, les mutuelles et l'Inami assurent la transition.Toutefois un modèle de concertation tripartite est mis en place concernant la politique bien-être, santé publique et famille. Trois chambres de concertation fonctionnent. La Chambre soins et santé accueille le secteur pour négocier et conclure des accords quant à la politique de santé. Sont présents les prestataires, les utilisateurs (patients), les assureurs soins de santé, les syndicats et le patronat.Une sécu flamande ( Vlaamse sociale bescherming - VSB) se met en place pour la législature 2014-2019. Les mutualités y jouent un rôle. Voyant dans ses nouvelles compétences une opportunité, la Flandre intégrera progressivement dans sa sécurité sociale l'assurance dépendance (déjà existante), l'aide aux handicapés, l'aide aux personnes âgées, les soins résidentiels pour personnes âgées, les aides à la mobilité, les maisons de soins psychiatriques, les initiatives d'habitation protégée, l'aide aux familles, etc. Chaque Flamand verse 51 euros chaque année pour sa protection sociale. Les Bruxellois flamands s'affilient librement à la VSB moyennant un stage d'attente ramené à 5 ans.La situation la plus complexe concerne évidemment la Région bruxelloise. Il faut mettre à son crédit le fait qu'elle avait dès 2014 signé un avant-projet d'ordonnance créant un nouvel organisme d'intérêt public (OIP), Iriscare. C'était sans compter la complexité institutionnelle de Bruxelles. Le débat entre une gestion administrative ou paritaire s'est vite crispé au sein du Collège réuni de la Cocom (commission communautaire commune), soit le gouvernement bruxellois dans son ensemble, Flamands et francophones. Ce Collège rassemble, en ce qui concerne les compétences transmises, cinq ministres : Rudi Vervoort (PS), Didier Gosuin (Défi), Céline Fremault (cdH), Guy Vanhengel (Open-VLD) et Pascal Smet (s.pa). Un accord n'est intervenu qu'en juillet 2016.Finalement, Bruxelles aura un " Comité général de gestion ". Il fixera le budget d'IrisCare et ses grandes orientations. Il sera composé paritairement des syndicats traditionnels, des organismes assureurs, des prestataires de soins et du collège réuni. Les médecins et les mutuelles n'auront droit de vote que sur les matières les concernant.Les budgets des deux branches, soins de santé et aide aux personnes et, d'autre part, allocations familiales, sont gérés respectivement par le Conseil de gestion des soins de santé et de l'aide aux personnes et le Conseil de gestion des allocations familiales.Le Conseil de gestion des soins de santé accueille les mutuelles, les médecins, des représentants du patronat et des syndicats, plus deux commissaires du gouvernement et un représentant du conseil consultatif de la Cocom. Sous ce comité de gestion, on a créé quatre commissions techniques : santé mentale, prévention et 1re ligne de soins, accueil et dépendance, et personnes handicapées. Ce sont ces commissions techniques qui font office de médico-mut et de comité de l'assurance. Médecins et mutuelles y signeront des conventions et des accords.Toutefois, certaines matières échappent à cette gestion paritaire du comité général de gestion d'Iriscare et sont gérées par l'administration de la Cocom : l'entièreté de la politique hospitalière, les soins de santé mentale hors hôpitaux, l'organisation proprement dite des soins de santé de première ligne et le soutien aux professions de 1re ligne.On assiste donc à une répartition alambiquée des compétences entre IrisCare et l'administration. Toutefois, mutuelles et syndicats de médecin peuvent se réjouir d'être moins sur la touche qu'en Flandre.Cette structure a plusieurs grands chantiers devant elle, dont le Plan santé bruxellois qui concerne toutes les compétences santé du ressort de la Région bruxelloise. Le ministre Gosuin devrait le rendre public fin avril.Le cas de la Wallonie dans nos éditions papier.