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Avec la Coupe du monde de football qui vient de débuter en Russie, les supporters donnent de nouveau de la voix. Mais quel sont les mécanismes cérébraux qui régissent leurs comportements, parfois un peu fous ?De nombreuses études en psychologie sociale ont montré que nous avons naturellement tendance à favoriser les membres d'un groupe social auquel nous appartenons. Des chercheurs français et brésiliens ont voulu savoir quelles régions cérébrales étaient impliquées. Pour cela, ils ont recruté 27 supporters des quatre principaux clubs de football de Rio de Janeiro et ils les ont soumis à un test de motivation altruiste un peu particulier pendant que leur cerveau était observé à l'IRMf. Choisir des supporters permet en effet de disposer d'un groupe "naturel", où le sentiment d'appartenance des sujets au groupe est réel et constant. Chaque sujet devait actionner d'une main un capteur de force à l'intérieur d'un scanner afin de gagner une somme d'argent proportionnelle à l'effort fourni, soit pour soi-même, soit pour des supporters inconnus de son équipe de football, soit pour des inconnus non supporters de son équipe. Plus les participants appuyaient fort, plus la somme était importante.L'analyse montre que les supporters parviennent à appuyer plus fort lorsqu'il s'agit de faire gagner de l'argent aux "supporters amis" plutôt qu'à ceux d'un groupe extérieur. Ils sont toutefois plus efficaces encore quand ils empochent eux-mêmes les gains.Mais l'intérêt de l'expérience réside ailleurs : il est apparu que les supporters agissent vis-à-vis des autres supporters de leur équipe, même de parfaits inconnus, de la même façon qu'ils le feraient avec des membres de leur propre famille.En effet dans les trois configurations du test, la motivation pour gagner de l'argent engage la partie médiale du cortex orbitofrontal (mOFC), une zone entrant en jeu dans les processus de décision. Mais surtout, lorsque l'effort est fourni en faveur d'un fan de la même équipe, les auteurs constatent que cette mOFC présente une connectivité fonctionnelle accrue ainsi que des réponses hémodynamiques plus fortes avec une autre zone du cerveau, le cortex cingulaire subgénual (SCC). Or cette zone est connue pour être impliquée dans les comportements altruistes et les sentiments d'attachement et d'affiliation à un groupe, en particulier la famille. Que retenir d'une telle étude ? Les résultats de l'IRM fonctionnelle permettent de mieux comprendre les bases cérébrales des liens qui unissent la motivation altruiste et l'attachement pour un groupe social. Ces liens se manifestent par des phénomènes d'appartenance au groupe qui peuvent aussi bien être source de solidarité que de fanatisme.Dans le cas d'une Coupe du monde, on peut imaginer que le sentiment d'appartenance à une nation vient s'ajouter à ce lien quasi familial qui unit des supporters entre eux et à leur équipe. Avec des ressorts motivationnels aussi forts, nichés dans le cerveau, on comprend mieux l'engouement un peu fou dont certains font preuve durant un match."Comprendre les mécanismes neuronaux impliqués dans l'appartenance au groupe et le comportement pro-groupe peut ouvrir la voie à de nouvelles techniques de modulation du cerveau capables de traiter des problèmes cliniques tels que les comportements antisociaux et autres symptômes psychiatriques, y compris les comportements agressifs liés au sport", conclut le Dr Tiago Bortoloni, auteur principal de l'étude.(référence : Scientific Reports, 23 novembre 2017, doi : 10.1038/s41598-017-15385-7)https://www.nature.com/articles/s41598-017-15385-7