L'Allemagne vient de libéraliser l'usage du cannabis dans un cadre médical. Au-delà des passions que cela déchaine entre les protagonistes des deux camps qui s'opposent sur cette décision, il y a la recherche scientifique. Ainsi l'équipe dirigée par Maria Nicolodi (Florence, Italie) a étudié l'intérêt du cannabis dans la prévention des crises migraineuses.

Douleurs

Les chercheurs ont tout d'abord voulu connaitre la dose qui était souhaitable à conseiller. Ils ont mené leur travail sur 48 volontaires migraineux chroniques qui ont reçu un traitement combinant du THC et du cannabidiol (CBD). Lorsque la dose est de moins de 100 mg, cela ne produit aucun effet ; à 200 mg, les douleurs aigües baissent de 55%. Lors d'une phase 2, 79 patients ont été inclus. La moitié des patients a reçu de l'amitriptyline à raison de 25 mg ou 200 mg de la combinaison THC+CBD pour 3 mois. Un autre groupe de 48 patients souffrant de céphalées de Horton (cluster headache) a reçu la combinaison THC+CBD ou 480 mg de verapamil ; les deux groupes ont pu bénéficier d'un traitement d'urgence. Les résultats montrent une diminution de 40% des crises migraineuses et de la sévérité des attaques de cluster headache. C'est particulièrement le cas pour les patients souffrant de céphalées de Horton ayant développé une migraine dans l'enfance, mais pas chez les autres.

M Bialer (Jérusalem, Israël)
M Bialer (Jérusalem, Israël)

Dans l'épilepsie aussi

Dans un tout autre domaine, là où on ne l'attendrait peut-être pas, le cannabis a également fait parler de lui : l'épilepsie. En effet, actuellement si l'on tient compte des essais précliniques jusqu'aux études de phase 3 pour traiter les patients souffrant de formes réfractaires d'épilepsie. Les travaux concernant le CBD semblent bien avancés. M Bialer (Jérusalem, Israël) a dressé un tableau de l'usage du CBD dans ce contexte. Le CBD semble particulièrement efficace pour les patients souffrant d'un syndrome de Lennox-Gastaut ou d'un syndrome de Dravet. Ainsi, une équipe espagnole a-t-elle présenté une étude de cas sous forme de poster. Pour mémoire, le syndrome de Dravet est l'une des causes de crises épileptiques les plus sévères survenant chez l'enfant en raison de mutation sur le gène SCN1A. Cependant, depuis plusieurs années une autre mutation est mise en cause : STXBP1. Cette mutation a été mise en cause dans l'apparition de fièvre à des degrés de sévérité très divers chez les patients. Le cas espagnol était une femme adulte, ce qui est peu fréquent. Néanmoins, le traitement par CBD s'est révélé efficace. Il s'agirait donc d'une arme de plus dans l'arsenal thérapeutique. Bialer a fait état d'une autre étude de cas ayant permis de faire diminuer le nombre de crises de 50%. Dans 9% des cas traités, les patients se sont retrouvés en rémission complète.

Tako-tsubo

Cependant, il ne faut pas négliger non plus les effets potentiels délétères du cannabis. Comme l'ont rappelé Walid Alesefir et ses collègues de Nancy, plus de 2 millions de personnes à travers le monde se sont essayées au cannabis l'année dernière. L'équipe française rapporte le cas d'une femme de 29 ans, grande consommatrice de cannabis. Celle-ci a été admise aux urgences puis en unités de soins intensifs pour défaillance cardiaque accompagnée de crises tonicloniques généralisées. Cette femme présentait un syndrome de tako-tsubo, ou syndrome des coeurs brisés. L'exploration neurologique a mis en évidence de multiples sites d'infarctus ischémiques dans les deux lobes. Pour les auteurs, l'abus de cannabis peut expliquer tous ces phénomènes en cascade. Si le cannabis n'est pas habituellement associé à l'épilepsie, il peut être considéré comme une cause de la maladie cardiaque ayant provoqué alors les AVC ischémiques.

Bialer tempère : "ces substances ne sont pas destinées à être utilisées très largement dans le cadre de l'épilepsie. Cependant, cela apparait comme une option sérieuse pour certains cas précis et notamment les enfants et les jeunes adultes jusque 20 ans. On s'attend d'ailleurs à ce que le CBD soit reconnu cette année encore par la FDA et l'approbation devrait même venir encore plus tôt de l'agence européenne, EMA.

Références:

Nicolodi M. et al. Therapeutic Use of Cannabinoids - Dose Finding, Effects and Pilot Data of Effects in Chronic Migraine and Cluster Headache EAN 2017 Abstract # EP2105.

Bialer M New antiepileptic drugs on the horizon: neurosteroids, cannabinoids, non-teratogenic valproic acid derivatives and YKP3089 EAN 2017 Abstract # SYMP05_2.

Gary Alvarez Bravo Adult phenotype of Dravet syndrome associated with STXBP1 (syntaxin binding protein 1) mutation and good response to cannabidiol treatment. EAN 2017 Abstract # EP1068.

Alesefir W et al. Cannabis Abuse: from Tako-tsubo cardiomyopathy to cerebral vascular infarcts and cognitive disorders. EAN 2017 Abstract # POD226.

L'Allemagne vient de libéraliser l'usage du cannabis dans un cadre médical. Au-delà des passions que cela déchaine entre les protagonistes des deux camps qui s'opposent sur cette décision, il y a la recherche scientifique. Ainsi l'équipe dirigée par Maria Nicolodi (Florence, Italie) a étudié l'intérêt du cannabis dans la prévention des crises migraineuses.DouleursLes chercheurs ont tout d'abord voulu connaitre la dose qui était souhaitable à conseiller. Ils ont mené leur travail sur 48 volontaires migraineux chroniques qui ont reçu un traitement combinant du THC et du cannabidiol (CBD). Lorsque la dose est de moins de 100 mg, cela ne produit aucun effet ; à 200 mg, les douleurs aigües baissent de 55%. Lors d'une phase 2, 79 patients ont été inclus. La moitié des patients a reçu de l'amitriptyline à raison de 25 mg ou 200 mg de la combinaison THC+CBD pour 3 mois. Un autre groupe de 48 patients souffrant de céphalées de Horton (cluster headache) a reçu la combinaison THC+CBD ou 480 mg de verapamil ; les deux groupes ont pu bénéficier d'un traitement d'urgence. Les résultats montrent une diminution de 40% des crises migraineuses et de la sévérité des attaques de cluster headache. C'est particulièrement le cas pour les patients souffrant de céphalées de Horton ayant développé une migraine dans l'enfance, mais pas chez les autres.Dans l'épilepsie aussiDans un tout autre domaine, là où on ne l'attendrait peut-être pas, le cannabis a également fait parler de lui : l'épilepsie. En effet, actuellement si l'on tient compte des essais précliniques jusqu'aux études de phase 3 pour traiter les patients souffrant de formes réfractaires d'épilepsie. Les travaux concernant le CBD semblent bien avancés. M Bialer (Jérusalem, Israël) a dressé un tableau de l'usage du CBD dans ce contexte. Le CBD semble particulièrement efficace pour les patients souffrant d'un syndrome de Lennox-Gastaut ou d'un syndrome de Dravet. Ainsi, une équipe espagnole a-t-elle présenté une étude de cas sous forme de poster. Pour mémoire, le syndrome de Dravet est l'une des causes de crises épileptiques les plus sévères survenant chez l'enfant en raison de mutation sur le gène SCN1A. Cependant, depuis plusieurs années une autre mutation est mise en cause : STXBP1. Cette mutation a été mise en cause dans l'apparition de fièvre à des degrés de sévérité très divers chez les patients. Le cas espagnol était une femme adulte, ce qui est peu fréquent. Néanmoins, le traitement par CBD s'est révélé efficace. Il s'agirait donc d'une arme de plus dans l'arsenal thérapeutique. Bialer a fait état d'une autre étude de cas ayant permis de faire diminuer le nombre de crises de 50%. Dans 9% des cas traités, les patients se sont retrouvés en rémission complète. Tako-tsubo Cependant, il ne faut pas négliger non plus les effets potentiels délétères du cannabis. Comme l'ont rappelé Walid Alesefir et ses collègues de Nancy, plus de 2 millions de personnes à travers le monde se sont essayées au cannabis l'année dernière. L'équipe française rapporte le cas d'une femme de 29 ans, grande consommatrice de cannabis. Celle-ci a été admise aux urgences puis en unités de soins intensifs pour défaillance cardiaque accompagnée de crises tonicloniques généralisées. Cette femme présentait un syndrome de tako-tsubo, ou syndrome des coeurs brisés. L'exploration neurologique a mis en évidence de multiples sites d'infarctus ischémiques dans les deux lobes. Pour les auteurs, l'abus de cannabis peut expliquer tous ces phénomènes en cascade. Si le cannabis n'est pas habituellement associé à l'épilepsie, il peut être considéré comme une cause de la maladie cardiaque ayant provoqué alors les AVC ischémiques.Bialer tempère : "ces substances ne sont pas destinées à être utilisées très largement dans le cadre de l'épilepsie. Cependant, cela apparait comme une option sérieuse pour certains cas précis et notamment les enfants et les jeunes adultes jusque 20 ans. On s'attend d'ailleurs à ce que le CBD soit reconnu cette année encore par la FDA et l'approbation devrait même venir encore plus tôt de l'agence européenne, EMA.Références:Nicolodi M. et al. Therapeutic Use of Cannabinoids - Dose Finding, Effects and Pilot Data of Effects in Chronic Migraine and Cluster Headache EAN 2017 Abstract # EP2105.Bialer M New antiepileptic drugs on the horizon: neurosteroids, cannabinoids, non-teratogenic valproic acid derivatives and YKP3089 EAN 2017 Abstract # SYMP05_2.Gary Alvarez Bravo Adult phenotype of Dravet syndrome associated with STXBP1 (syntaxin binding protein 1) mutation and good response to cannabidiol treatment. EAN 2017 Abstract # EP1068.Alesefir W et al. Cannabis Abuse: from Tako-tsubo cardiomyopathy to cerebral vascular infarcts and cognitive disorders. EAN 2017 Abstract # POD226.