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Le jdM : Pourquoi ces attaques précisément contre un "médicament" qui a le rapport risque-bénéfice parmi les plus faibles et qui, paradoxe, diminue le risque de maladie et donc "appauvrit" l'industrie pharma ? Est-ce dû au fait de l'intrusion dans le corps de bacilles atténués ? Le côté trop miraculeux ? La haine du progrès en général ?Pr Ph. S. : Je pense qu'il y a deux aspects. D'un côté, certains parents inquiets et mal informés qui, ne voyant plus les maladies infectieuses et n'en ayant pas vraiment entendu parler, ne voient pas l'intérêt de vacciner leurs enfants. Il est vrai que cette injection à un très jeune enfant n'ayant pas son libre arbitre, a quelque chose de choquant si l'on ne connaît pas le rationnel qui amène à le faire. Ajoutons à cela la surmédiatisation des rares effets secondaires, et le tour est joué. Dans cette même barque on retrouve les médecins, en première ligne devant l'hésitation vaccinale, parfois amenés à négocier de longues minutes pour quelque chose qui il y a à peine une génération, paraissait naturel. Nos médecins sont mal formés d'ailleurs à la vaccinologie, et ils ont parfois du mal à soutenir l'argument devant des parents surinformés, mais mal informés, par internet.. A ceci s'ajoute une profonde méconnaissance de la santé publique par la population, de ses ressorts, de ses exigences et de son importance pour le bien commun de la société.De l'autre côté, on trouve les anti-vaccins patentés qui font malheureusement de plus en plus de mal grâce à la caisse de résonance d'internet et des réseaux sociaux. Dans ce groupe disparate, on retrouve des intellectuels en mal de vocation messianique, des médecins en déshérence, des complotistes sur le thème du lobby industriel, des partisans de la santé naturelle. C'est de l'ordre de l'irrationnel ou plutôt, de l'anti-rationnel.Que peut-on répondre en particulier aux critiques incessantes sur les adjuvants ?Qu'ils sont indispensables à un certain nombre de vaccins qui sinon seraient insuffisamment efficaces. Le problème est surtout soulevé pour les sels d'aluminium. Honnêtement, à ce stade et après 90 ans d'utilisation, il n'y a pas d'évidence sérieuse de toxicité chronique, en particulier neurologique, mais la méfiance croît et la sociologie tend à l'emporter sur le rationnel scientifique. Il faut réexpliquer tout cela et accroître les efforts de recherche sur de nouveaux adjuvants. La perte de confiance tient en effet beaucoup à la problématique des adjuvants qui ont été sans vraie raison diabolisés et à la mauvaise image, à la méconnaissance de la logique capitalistique et des vraies exigences de fabrication et de sécurité des produits auxquels font face les industriels. Ceci dit, il leur incombe un gros effort de pédagogie vis à vis du "consommateur".Quelle conséquence sur la recrudescence des maladies infectieuses, et lesquelles en particulier/en premier selon vous ?Les maladies infectieuses de la prime enfance vont revenir, c'est déjà le cas pour la rougeole en Belgique, France, Suisse, Allemagne. La coqueluche aussi, puis les autres. Seule la variole a été vraiment éradiquée.