...

Pas de quoi redonner confiance dans nos services publics. Marc Bertrand, le Médiateur de la Wallonie et de la Fédération Wallonie-Bruxelles, a remis en mains propres vendredi son 4ème rapport annuel aux présidents des parlements régional et communautaire, André Antoine (cdH) et Philippe Courard (PS).Le document tire les enseignements des 4.317 dossiers recevables enregistrés en 2015. Un volume de "plaintes" en augmentation de 19% par rapport à l'année précédente. Ce qui a notamment donné lieu à plus de 35.000 actions, détaille l'auteur.Avec 3.319 démarches la visant, l'administration wallonne a attiré l'écrasante majorité de ces réclamations (77%), portant essentiellement sur des questions de fiscalité, de logement ou d'énergie. Là où la Communauté française en compte au total 998. À souligner cependant, les interpellations à l'encontre des services communautaires ont plus que septuplé (!) en l'espace d'un an. Et le Médiateur y voit pour explication principale la dernière réforme institutionnelle.Depuis le 1er janvier 2015, la seule véritable compétence de "santé" exercée par le ministère de la Fédération Wallonie-Bruxelles (FWB) n'est autre que l'agrément des prestataires de soins. Une nouvelle direction administrative y a même été spécifiquement crée au sein de la Direction générale de l'enseignement non obligatoire et de la recherche scientifique, elle-même dépendante de l'Administration générale de l'enseignement.Pour assurer cette nouvelle compétence, des agents du SPF de la Santé publique ont alors été transférés. Mais, "cette nouvelle direction est dotée d'un effectif réduit de moitié" par rapport à celui dont disposait l'administration fédérale, fait remarquer le rapport annuel.Depuis le transfert des compétences, une septantaine de plaintes ont été introduites auprès du Médiateur pour cette nouvelle compétence des agréments, manifestement vaste et complexe. "Le transfert des compétences dans ce secteur a créé un vrai casse-tête tant pour les usagers concernés que pour les administrations", ressort-il du bilan annuel.D'ailleurs, faute de vision "suffisamment claire des instances compétentes", même le SPF Santé publique hésitait dans le transfert ou non des demandes. "Le call center, resté commun au départ, renvoyait les demandeurs directement vers le Médiateur Wallonie et Fédération Wallonie-Bruxelles, même lorsque les matières restaient de la compétence fédérale", met en exergue le rapport. C'est que, pour certaines professions ou certains cas spécifiques, il faut tantôt s'adresser au niveau fédéral tantôt saisir la Communauté.Même si la matière a été transférée à la FWB, le diplômé doit pourtant continuer durant la période transitoire à introduire sa demande via un formulaire en ligne sur le site internet du SPF Santé. Et, "pour une même profession, le demandeur est censé s'adresser, selon les cas, tout d'abord à la Fédération pour l'agrément et ensuite au SPF pour le visa", insiste le Médiateur. L'ombudsman francophone a été plus particulièrement sollicité pour des demandes relatives à l'agrément des aides-soignantes. L'administration fédérale avait pris beaucoup de retard dans ce domaine. Les plaintes portaient souvent sur des délais particulièrement longs pour obtenir ledit agrément ou tout simplement une information sur le suivi du dossier. Ce que la direction communauté a tenté de "résoudre au plus vite". D'autres réclamations concernaient l'attestation relative au plan de stage en médecine générale, les dispenses ou les agréments pour une spécialisation, en oncologie, chirurgie plastique, orthopédie ou encore pédiatrie, pour ne citer que ces exemples. La compétence de l'agrément étant transférée du SPF à la FWB, on a assisté assez logiquement au transfert des réclamations du Médiateur fédéral au Médiateur des entités fédérées. Non sans quelques couacs. À l'instar de cette plainte relative à la reconnaissance d'un titre de médecin pour bénéficier d'une bourse de spécialisation dans une université de la Communauté flamande."Le Médiateur ne comprend pas pourquoi ce transfert a eu lieu car la demande de l'intéressée correspond à deux cas de figure qui restent du ressort de l'administration fédérale", relate ironiquement le rapport annuel.Après vérification auprès de l'université et de la Fédération, il est apparu que le dossier introduit auprès du SPF Santé publique en juin 2014 était "simplement ouvert et qu'aucun traitement ne semblait avoir eu lieu". À l'heure de la rédaction de ce rapport, le dossier était en phase d'être clôturé chez le Médiateur... fédéral.La lasagne institutionnelle n'est guère une nouvelle recette belge. Toutefois, "le foisonnement et la complexité des textes contribuent à rendre l'action administrative souvent difficilement compréhensible pour les citoyens, et à nuire à l'efficacité de l'administration", rappelle le Médiateur.Certes, avec un total pour 2015 de 62 plaintes recevables liées à l'agrément des prestataires de soins, le piètre bulletin de la Fédération Wallonie-Bruxelles peut sembler insignifiant au regard du nombre de décisions prises annuellement. Mais le rapport du Médiateur n'est reste pas moins une exhortation adressée tant aux administrations qu'aux décideurs politiques, auxquels il appartient d'éviter toutes ces situations litigieuses à l'avenir. Au nom du principe fondamental de "bonne administration", découlant normalement de la bonne gouvernance. Car comme l'interroge de façon rhétorique le Médiateur francophone, le traitement rigoureux et dans des délais raisonnables des dossiers des administrés ne traduit-il pas concrètement l'État de droit.