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Arrivé du Liban à l'âge de 17 ans pour entrer à la faculté de médecine de l'ULB, Gilbert Bejjani a décidé de faire sa carrière médicale et sa vie en Belgique. " Je me sens plus belge que libanais ", déclare l'anesthésisteLe dynamique quadragénaire semble mener plusieurs vies professionnelles de front : celles d'anesthésiste, de directeur de la Clinique de la Basilique, de représentant syndical pour l'Absym, de membre de l'association belge des directeurs d'hôpitaux... Les multiples activités du Dr Bejjani s'articulent autour de deux priorités qui lui sont très chères : la volonté continuelle de se former, de se remettre en question et d'apprendre et la conviction selon laquelle le médecin doit co-gérer le système de soins dans lequel il travaille." En tant que médecin, je me suis engagé depuis le berceau médical. Jeune anesthésiste, j'étais déjà représentant de mes camarades au DES. Je militais pour une meilleure adéquation des stages à la réalité de terrain. Ils étaient trop courts parfois. Lorsque je suis devenu résident, j'ai représenté les jeunes médecins au niveau du conseil médical de l'Hôpital Erasme. Je suis ensuite entré à l'Union professionnelle des anesthésistes et puis au Conseil d'administration de l'hôpital. Je siégeais déjà à l'Absym en tant que représentant de l'Hôpital Erasme. " D'un naturel disruptif, fourmillant d'idées, le Dr Bejjani apporte un vent frais dans la défense professionnelle. Une qualité qu'apprécient certains partenaires de la concertation qui siègent sur d'autres bancs. "Durant la campagne électorale pour les récentes élections médicales, j'ai été très content d'avoir pu infléchir certaines positions historiques et d'avoir pu favoriser un consensus générationnel qui permet d'évoluer. Le médecin est l'élément moteur de la transmuralité et de la médecine intégrée. Un médecin formé est un médecin qui a le respect et l'écoute de ses pairs. En outre, Il comprend le secteur de la santé. Ma spécialité en anesthésie m'a permis de travailler avec de nombreux autres médecins (urgentistes, intensivistes, internistes et toutes les spécialités chirurgicales...) et de connaître leur façon de travailler. La pratique de l'anesthésie donne une vision à 360°. Dans mon action syndicale, je réfléchis de la même façon. Il faut une vision à 360° pour défendre les intérêts de chacun des métiers. " Gilbert Bejjani se veut résolument constructif : "Mon engagement n'est pas corporatiste : le médecin ne doit pas être au centre, là c'est la place du patient, mais il doit être le moteur d'une dynamique nouvelle qui intègre des concepts d'innovation. Grâce à l'Association belge des directeurs d'hôpitaux, j'ai eu l'occasion d'aller à la rencontre de professionnels dans plusieurs pays (le Danemark, Singapour, le Portugal, le Canada, les Emirats Arabes...). Il faut voir ce qui se fait dans d'autres pays. Cette curiosité ouvre l'esprit. Par exemple, suite à ces rencontres, je plaide pour une plus grande liberté entrepreneuriale des directeurs d'hôpitaux belges qui, à mon avis, n'ont pas assez de marge pour manoeuvrer leurs institutions." Ce polyglotte (qui parle français, arabe, anglais, espagnol : NDLR) - né dans une famille qui a voyagé beaucoup au gré des affectations d'un père militaire de carrière - a suivi de nombreuses formations tant dans sa spécialité médicale qu'en management hospitalier et économie de la santé en Belgique et à l'étranger. "J'ai suivi, il y a dix ans, l'Executive Master en management des institutions de santé et de soins parce que j'estimais qu'il fallait maîtriser certaines compétences pour pouvoir siéger efficacement dans un Conseil médical." Actuellement, il se perfectionne en néerlandais. Un atout pour discuter dans les structures de concertation fédérale, mais " surtout une forme de respect de pouvoir échanger dans la langue de l'autre."Gilbert Bejjani estime que les relations entre les acteurs doivent évoluer ainsi que certains rôles. " A titre personnel, je trouve, par exemple, que les mutuelles devraient davantage s'occuper de défendre l'accessibilité des soins pour les patients, en partenariat avec les médecins et les autres acteurs de la santé, et développer la santé mobile que du financement du système."Remettre les choses en perspective est une seconde nature chez le Dr Bejjani. A la fin de notre entretien, tout en appuyant avec enthousiasme le concept du Prix du Spécialiste de l'année, " qui met toute la profession à l'honneur ", il nous glisse : " à mon avis, il n'y a pas un seul Spécialiste de l'année. Tous ceux qui pratiquent la médecine en veillant à promouvoir la qualité des soins peuvent recevoir ce titre ".Vincent Claes