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En préambule de la thématique, Jean-Michel Longneaux, rédacteur en chef, souligne l'importance que revêt un contrôle de la qualité extérieure à l'institution. En effet, l'autocontrôle par les individus soignants ne fait aucun doute. Mais ce n'est pas suffisant.L'accréditation soulève toutefois pour Longneaux, deux objections : on ne peut évaluer que ce qui est évaluable, mesurable, objectivable. L'accréditation entraîne donc le risque "d'une réification du métier qui occulte la relation de soin". Par ailleurs, une fois la réponse (positive) aux questions posées par les certifications, qu'en sera-t-il le lendemain ? Deuxième objection : l'accréditation n'apporte pas forcément une amélioration réelle sur le terrain de la qualité des soins et le concept lui-même pose la question de l'évaluation de l'accréditation.Ethica Clinica note pourtant quatre avantages incontestables de l'accréditation. Un : l'occasion pour les soignants et les médecins d'avoir une vue globale de leur institution et donc de favoriser l'interdisciplinarité ; Deux : l'accréditation, par voie de conséquence du premier point, oblige ou encourage à réinventer son métier ; Trois : l'accréditation améliore en principe l'éthique puisqu'elle se penche sur des critères qui y sont liés. Elle est donc (quatrième point) "une chance pour les comités d'éthique" et renforce leur importance. Conclusion : "L'accréditation n'est en soi ni bonne ni mauvaise : elle est ce que les institutions ou les travailleurs en font."Alors que la plupart des hôpitaux francophones devraient être accrédités d'ici deux ans, Denis Herbaux, CEO de Paqs (Plateforme pour l'amélioration continue de la qualité des soins et de la sécurité des patients), pose la vraie question, selon lui : nos soins sont-ils de qualité ? La plupart des acteurs de santé en sont persuadés en Belgique. Mais lorsqu'on confronte notre système à la célèbre définition de la qualité des soins qu'en fait l'OMS, c'est moins évident (1). Tout le monde en est convaincu mais peu de gens sont en mesure de le démontrer. La bonne place de la Belgique dans les classements internationaux est liée le plus souvent à l'excellente accessibilité géographique et financière du système mais pas sa qualité intrinsèque. Notre mauvais score en matière d'infections nosocomiales (l'équivalent en mortalité de la chute de 20 Airbus A330 par an) pose la question de la sécurité des soins et donc de leur (mauvaise) qualité. Mais l'accréditation améliore-t-elle vraiment la qualité ?, demandent les contempteurs du concept. Les plans plus ou moins quinquennaux (Donabédian 2008-2012, plan 2013-2017) n'ont pas eu d'impact majeur sur l'amélioration de la qualité, estime Denis Herbaux. "Depuis quelques mois on a appris que les hôpitaux danois arrêtent l'accréditation. C'est bien la preuve que cela ne sert à rien !" En réalité, note-t-il, le Danemark aurait déjà dépassé le stade de l'accréditation et considère qu'elle... est insuffisante. Comme étape vers plus de qualité, l'accréditation est donc une option à défendre.Jean-Michel Debry, consultant et par ailleurs collaborateur régulier du journal du Médecin et Jean-Marie Limpens, administrateur délégué du CHR Mons-Hainaut, proposent, eux, une démarche pas à pas, méthodique appelée "coalescence". C'est la voie qu'a choisie le CHR Mons-Hainaut après avoir traversé "une période de turbulences". L'hôpital, via la certification ISO9001, "a initié la démarche à la demande spontanée de certains services (Unité de soins palliatifs, clinique du Sein...) avant de la mettre en oeuvre dans d'autres services". ISO9001 a ceci de particulier qu'il "irradie" non seulement dans les autres services mais aussi les services support. D'où le concept de coalescence... qui débusque par contamination les maillons faibles. ISO ne détermine toutefois que l'objectif, pas comment y arriver. L'hôpital montois, confronté par le passé au départ d'un nombre important de médecins, se réjouit du choix ce cette approche bottum-up. "La coalescence peut coller à l'évolution d'un tissu lésé qui se régénère à la faveur d'un bourgeonnement cellulaire progressif, orienté et déterminé."Enfin, Marcel Gonieau, auditeur des systèmes qualité, a constaté, par son expérience, que les approches qualité type ISO9001, malgré leurs imperfections, mobilisent l'ensemble du personnel et améliorent l'organisation générale de l'institution car chacun peut proposer des améliorations. Il se méfie toutefois des approches JCI (américaine) ou ACI (canadienne), car elles "favorisent le classement des établissements de soins suivent des critères d'excellence des équipements et du personnel". Elles risquent d'aboutir à des classements tels que ceux subis par les universités dont les mieux dotés financièrement se retrouvent les mieux classés "au mépris de l'accessibilité".